Page:Revue des Deux Mondes - 1881 - tome 48.djvu/385

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
L'ART DE LA NATURE
ET LA
FINALITE ESTHETIQUE
SELON LE SPIRITUALISME CONTEMPORAIN

I. Félix Ravaisson, Rapport sur la philosophie en France au XIXe siècle. — De l’Habitude. — Essai sur la Métaphysique d’Aristote. — II. Jules Lachelier, du Fondement de l’induction. — De Natura syllogismi — III. E. Boutroux, de la Contingence des lois de la nature. — IV. Paul Janet, les Causes finales.

Il est une école qui ramène au beau le vrai et le bien. C’est dans l’esthétique et dans l’art qu’elle cherche les premiers principes de la science comme de la conduite ; les lois de la logique et de la morale ne sont pour elle que l’abstraction du beau, qui est la seule réalité. L’induction, sur laquelle repose toute connaissance de la nature, est pour cette école une sorte de poésie cherchant à pénétrer le sens de l’univers ; la science est une esthétique éprise d’harmonie et de beauté. Savoir, c’est créer comme la nature crée, dessiner comme elle dessine, peindre comme elle peint, chanter comme elle chante, penser comme elle pense ; et le bien consiste à vouloir comme elle veut. L’interprétation d’une œuvre d’art inspirée doit être aussi une inspiration, et de même qu’en une certaine mesure il faut devenir Homère pour bien comprendre Homère, il faut devenir la nature pour la saisir par la pensée et pour la suivre par la volonté : sequere naturam. Cachée derrière ses voiles, Isis invite ses enfans à deviner, à reproduire ses traits, et, pour cela, à regarder au plus profond d’eux-mêmes : chez celui qui aura conçu, réalisé l’image la plus ressemblante, elle reconnaîtra son vrai fils, et quel sera-t-il ? Celui qui l’aura représentée la plus belle.

Telle est la thèse que, sous des formes diverses, soutiennent les moralistes esthéticiens.