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Page:Revue des Deux Mondes - 1881 - tome 48.djvu/442

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humaine comparable aux plus grands dont l’histoire fasse mention. Notre siècle, dont tous les travaux peuvent ne pas mériter la même louange, laissera, en ce qui touche les œuvres de la science proprement dite, un renom qu’aucun autre ne semble de voir surpasser. Certes, dans le domaine du beau, le XIXe siècle n’a pas été stérile, et notre patriotisme est intéressé à l’affirmer ; mais son caractère particulier, ses titres à une gloire incontestée, résident spécialement dans les découvertes scientifiques appliquées à la conquête du bien matériel et à la possession de ce monde fini où vit l’homme et sur lequel sa puissance s’exerce avec une supériorité de plus en plus assurée. Or ces feuilles volantes, ces carrés de papier qu’on nomme les titres de notre fortune mobilière demeurent le symbole des découvertes de la science qui a donné naissance à tant d’entreprises : on leur doit à cet égard considération et respect.

La richesse mobilière, en outre, fruit du progrès du travail matériel, constitue le plus actif instrument avec lequel ce travail doit se développer encore, puisque c’est à l’aide de la transmission dès valeurs mobilières que se constitue principalement le crédit par-dessus tout et plus que le capital même nécessaire à l’extension de l’industrie et du commerce.

Entre la possession de titres transmissibles de la main à la main, presque sans frais, dont l’achat et la vente ne coûtent que des droits minimes, sur lesquels on emprunte sans formalités judiciaires ni délais, et la propriété de terres ou de maisons dont il faut constater l’origine, rechercher les titres constitutifs, avec des délais interminables de purge d’hypothèques, quelle différence pour la multiplicité, le bon marché et l’utilité des transactions ! Si la propriété immobilière offre des garanties de sécurité plus grandes ; si elle n’est pas exposée à se perdre, à disparaître par le moindre accident, en retour, elle se prête à moins d’emplois profitables ; elle exige aussi des soins plus absorbans et présente des vicissitudes et des aléas dangereux. C’est pour y échapper que la plupart des capitalistes renoncent à la propriété immobilière ou n’y consacrent qu’une part relativement minime de leur fortune, se bornant dans les villes comme dans les campagnes à posséder les immeubles qu’ils occupent, en y cherchant les jouissances du luxe, les agrémens de la résidence, non les bénéfices de l’exploitation.

De ce délaissement de la propriété immobilière par les petits capitaux en raison de la difficulté de la mise en valeur, par les moyennes fortunes qu’attire la fixité des rentes mobilières et par les grandes pour des motifs de convenances personnelles, il serait néanmoins téméraire de prédire une révolution complète dans les mœurs de notre pays ; mais, soit dans ses procédés de culture, soit dans son mode de se constituer, la propriété foncière devra se