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L’ECCLESIASTE

ETUDE SUR L’AGE ET LE CARACTÈRE DU LIVRE

Dans ce volume, étrange et admirable, que la nation juive a donné à l’humanité, et que tous les peuples ont appelé la Bible, la pensée religieuse est tellement dominante, qu’on est d’abord surpris d’y trouver quelques pages profanes. Le Cantique des cantiques prouve, comme on aurait bien pu le supposer a priori, que le vieil Israël fut jeune à son jour. Un second livre plus singulier, l’Ecclésiaste, montre que ce peuple, livré en apparence tout entier à la passion de la justice, ce vengeur ardent de l’honneur de Jéhovah, fut sceptique à certaines heures. J’ai essayé de faire connaître le Cantique des cantiques et de résoudre quelques-unes des difficultés qu’il présente. Je regarde comme indispensable au tableau que j’ai voulu faire de la conscience d’Israël d’examiner de près l’Ecclésiaste[1]. Le problème est en un sens plus facile. Car, si les obscurités de détail sont, dans l’Ecclésiaste, au moins aussi nombreuses que dans Job et le Cantique, le caractère général et l’âge relatif du livre prêtent à moins de doutes. L’ouvrage compte certainement entre les plus modernes de la littérature hébraïque. Quant au caractère sceptique ou épicurien de la composition, on peut incidenter sur le sens précis de deux ou trois versets ; mais cela importe peu. Si l’auteur

  1. La traduction à laquelle cette étude sert d’introduction paraîtra incessamment.