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américaines, a une origine aristocratique. Elle porte le nom de lord Baltimore, le premier colonisateur du Maryland, et il y a aujourd’hui cent cinquante ans qu’elle a été baptisée, Les couleurs héraldiques de lord Baltimore étaient jaune et noir, or et sable, dirait-on en termes de blason. Or Linné a donné le nom de Baltimore oriole (loriot de Baltimore) à un oiseau de ces régions, au plumage jaune et noir. La ville de Baltimore a adopté cet oiseau comme emblème ; elle a tenu par là à se rattacher au souvenir de son fondateur, et je suis convaincu que, si quelque descendant de lord Baltimore venait rendre visite à cette création de son aïeul, il y recevrait encore un bien autre accueil que nous. En l’honneur de ce cent-cinquantième anniversaire, la ville de Baltimore a résolu de donner une fête qu’on célébrera à certains intervalles et qui est destinée à porter le nom d’Oriole feast. A dire vrai, l’anniversaire et, par conséquent, la fête, ont déjà été célébrés l’année dernière ; mais comme les habitans de Baltimore ont conservé un agréable souvenir de ces réjouissances et comme il n’y a pas de bonne fête sans lendemain, le conseil municipal a résolu d’en donner une seconde représentation cette année en la faisant coïncider avec notre réception. Nous n’avons donc pas le droit de prendre toute cette joie pour nous. Mais, ce qui est bien à notre compte et ce dont nous nous montrons particulièrement reconnaissans, c’est le cordial accueil que nous recevons d’un chacun et en particulier de ces Français de cœur et d’origine qui font partie du comité de réception. La glace des premiers rapports est rompue, et nous nous sentons déjà environnés à Baltimore de cette même atmosphère de sympathie qui nous avait rendu si agréable le séjour de New-York. Le plus grand journal de Baltimore a publié le matin même en français un article des plus chaleureux où il rappelle les services autrefois rendus par la France à la liberté américaine, et ses colonnes sont remplies des plus aimables notices et anecdotes sur nos grands-pères et sur nous-mêmes. Décidément, nous sommes aujourd’hui l’événement de la ville et nous pouvons faire concurrence au loriot.

Les membres du comité sont venus nous chercher à l’hôtel. Pour ne point marcher toujours en procession, nous nous partageons par petites bandes. Je fais partie de celle qui doit visiter les rues commerçantes de la ville et les bâtimens publics, sous la directes d’un général qui est, je crois, vice-président du comité. Le nombre des généraux n’est pas, en Amérique, inférieure celui des colonels. Sont qualifiés généraux de droit ou par courtoisie : 1° tous les généraux ou anciens généraux de l’armée régulière ; 2° tous les généraux ou anciens généraux de la milice ; 3° tous les anciens généraux ayant servi dans les armées du Sud, 4° tous les anciens colonels ayant servi pendant la guerre de sécession dans les armées du Nord, qu’au