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Page:Revue des Deux Mondes - 1882 - tome 50.djvu/821

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mêlés avec les eaux qui les ont entraînés, seront reçus dans un canal broyeur à forte pente, muraille sur ses parois, pavé en matériaux résistans à son plafond, — dans lequel s’opérera un premier débourbage ayant pour effet de mettre en suspension les limons argilo-calcaires et de les séparer des galets, cailloux et sables quartzeux. Une sorte de tamisage opéré sur des grilles de fer inclinées projettera les substances caillouteuses en des emplacemens convenablement choisis dans le lit des ravins avoisinant la ligne de faîte. Des bondes de fond manœuvrées de temps à autre avec intelligence permettront d’éliminer également les sables quartzeux. Les eaux limoneuses, ainsi débarrassées de toute matière inerte, continueront leurs cours dans un canal muraille de section régulière, suivant la pente uniforme ou moyenne de la ligne de faîte des terrains à améliorer.

La quantité de limons que peut charrier un courant est en quelque sorte illimitée. Le canal de Marseille, dérivé de la Durance, qui n’a qu’une pente de 0m, 33 par kilomètre et n’a pas été établi dans toutes les conditions nécessaires pour ménager le maximum de vitesse des eaux, charrie parfois jusqu’à 4 et 5 pour 100 du volume de ses eaux en limons et en charrierait bien davantage si la Durance les lui fournissait. Ces limons se maintiennent en suspension sur un parcours de plus de 100 kilomètres. Non-seulement ils ne forment aucun atterrissement dans le lit du canal, mais ils accompagnent ses eaux dans les plus petites rigoles, suivant leurs sinuosités les plus irrégulières, remontant dans les conduites forcées de distribution, sans jamais les obstruer, tant que l’écoulement libre des eaux se maintient avec une vitesse même très inférieure à celle du canal, qui atteint à peine 1 mètre à la seconde

Cet exemple du canal de Marseille, d’autres expériences, qu’il serait trop long de citer, prouvent de la manière la plus convaincante qu’un canal construit pour le transport des limons pourra en entraîner une quantité au moins égale au vingtième du volume de ses eaux, pour peu que leur vitesse atteigne 0m, 75, et beaucoup plus si la vitesse est supérieure à cette limite.

Rien ne sera donc plus facile que de maintenir ces limons en suspension non-seulement dans le canal muraille suivant le faîte principal, mais dans les rigoles de deuxième et troisième ordre qui porteront les eaux troubles sur les terrains à féconder. Le répandage des limons arrivés au lieu d’emploi se fera de la manière la plus simple en recevant les eaux troubles dans des compartimens sensiblement horizontaux, clos de planches ou de bourrelets de terre, où s’opérera le dépôt sur telle épaisseur qu’on aura jugé à propos de lui donner.