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réduites à une longueur de 30 à 40 kilomètres, loin de se borner à desservir des localités particulières et d’éviter des tracés dispendieux, grâce à la connivence des autorités départementales, plusieurs des lignes concédées par elles se soudèrent les unes aux autres, traversèrent plusieurs départemens successifs, prétendirent s’assurer de longs parcours et des transports abondans, firent concurrence aux grandes lignes et aspirèrent en un mot au rôle de chemins d’intérêt général. Dans beaucoup de cas, sous la pression d’influences politiques, on ferma les yeux sur ces transgressions à la loi ; il n’est pas besoin de rappeler les désastres financiers qui ont suivi la création de ces entreprises, dont plusieurs ont abouti à des procès scandaleux ; Il suffit pour montrer à quel point, sous prétexte d’intérêt local, on avait essayé de constituer des concurrences aux grands réseaux, de citer entre autres le chemin d’Orléans à Châlons et à Rouen et le singulier projet d’une ligne de Dunkerque à Perpignan. La longueur totale des chemins ainsi concédés était de 4,381 kilomètres et, à la fin de l’empire, en mars 1870, une demande venait d’être adressée au corps législatif pour introduire les changemens nécessaires dans la loi de 1865 et sauvegarder la situation des grands réseaux illégalement menacée.


III

La date néfaste de 1870-1871 ouvre la dernière période qu’il nous reste à examiner. Pendant la guerre, comme à l’occasion de nos troubles civils, les chemins de fer avaient rendu de tels services, il devenait si nécessaire de donner le plus d’alimens possible au travail national, que de toutes parts surgirent de nouvelle demandes de concessions. Les anciennes compagnies s’empressèrent de proposer, à l’aide de la révision de leurs contrats, de développer leurs réseaux, et l’état se vit contraint de racheter des lignes à moitié construites et d’en construire lui-même. Ce fut l’heure des projets les plus téméraires et des spéculations les plus audacieuses. L’assemblée nationale eut même à se prononcer sur la demande d’une ligne directe de Calais à Marseille, faisant double emploi avec les chemins du Nord et de Lyon. Au milieu d’une telle effervescence, il fallut donc que le gouvernement et les grandes compagnies cherchassent le moyen de satisfaire l’impatience publique, sans compromettre l’œuvre ancienne, et tout au contraire en l’améliorant. De leur entente naquirent les nouvelles conventions de 1875 et de 1878, de même que c’est au mouvement général des esprits qu’il faut rapporter la conception des vastes travaux qui porte le nom de son auteur et que l’on appelle le plan de M. de Freycinet.

Les lois de 1875 ont reproduit exactement, les conventions de