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intérêt démocratique ne commandera d’exagérer les seconds au détriment des premiers. »

Quand nous dressons ce bilan des solutions incomplètes, des erreurs commises, des questions témérairement soulevées, nous n’accusons aucun ministre ni aucun parti ; nous n’accusons pas davantage une forme de gouvernement qui n’a pas cessé depuis douze ans de fonder sa légitimité sur sa nécessité même. Le mal vient surtout de la fausse situation qu’a faite à la république i après 1870, comme après 1848, la coalition de ses adversaires sous le drapeau des intérêts religieux. Les républicains n’ont pas su se défendre contre la tentation de prendre à leur tour pour programme la résistance à la revendication excessive ! de ces intérêts, c’est-à-dire ce qu’on appelle le « cléricalisme. » Rien de plus dangereux que cette confusion des questions, religieuses et des questions politiques. On subit bien vite de part et d’autre la pression de l’esprit de secte. On ne voulait que se tenir sur la défensive : on devient intolérant et envahissant ; on institue des « gouvernemens de combat » contre des excès avérés, et ils tournent bientôt les armes dont ils disposent contre les droits les plus légitimes de leurs adversaires. Dans ces luttes politiques sur le terrain religieux, l’enjeu principal, a toujours été l’instruction publique. Maîtres de cet enjeu en 1850, les partis hostiles à la république l’ont fait passer autant qu’ils ont pu aux mains du clergé. Ils ont eu également la partie belle après les élections générales de 1871, et ils n’ont rien négligé pour faire le même usage de l’enjeu toujours disputé. Leur impuissance dans l’ordre politique a déjoué leurs espérances dans l’ordre religieux. Devenus les plus forts, les républicains n’ont pas eu la prudence de leurs devanciers de 1848. Prenant l’offensive, ils n’ont su résister à aucun des entraînemens d’une lutte religieuse, et, comme toujours, les partis vainqueurs ont voulu par l’instruction publique étendre leur victoire sur les âmes elles-mêmes. C’était inévitablement livrer l’instruction publique aux entreprises de leur fraction la plus ardente, qui, seule, dans une lutte de ce genre, a conscience du but qu’elle poursuit et y apporte un intérêt passionné. Les répugnances des modérés n’ont réussi qu’à faire prévaloir des demi-mesures, et, trop souvent, leur résistance incomplète et timide n’a fait que marquer des étapes après chacune desquelles des concessions plus larges leur ont été arrachées. Voilà le vice qui a gâté et qui menace de gâter de plus en plus tant de généreuses intentions et de louables efforts pour le développement de l’instruction.

Nous voudrions dégager de cette confusion funeste, pour les étudier en elles-mêmes, les questions qui concernent proprement l’enseignement secondaire. Ce sont les plus complexes et les plus