redoublement de sévérité. De nouvelles lois sont édictées sous le nom de lois pénales. Elle% ont un double but : favoriser le morcellement des biens que les catholiques peuvent encore posséder, empêcher les catholiques d’acquérir d’autres propriétés. Pour favoriser le morcellement, ni droit d’aînesse, ni liberté de tester dans les familles catholiques ; le partage égal et forcé à chaque génération : si pourtant le fils aîné d’un catholique se fait protestant, le droit d’aînesse revit en sa faveur ; c’est une prime offerte à l’apostasie. Pour atteindre le second but, interdiction d’abord aux catholiques d’acheter des terres, interdiction ensuite d’hériter de leurs parens protestans. Après les propriétaires, les fermiers : s’ils sont catholiques, on ne peut pas leur consentir des baux de plus de trente et un ans ; s’ils sont catholiques, ils doivent payer un fermage qui représente au moins les deux tiers du produit de la terre ; autrement tout protestant, sur simple prestation de serment, peut se substituer au bail.
Telle était la législation inique que l’Angleterre ancienne avait léguée à l’Angleterre nouvelle ; tel était l’odieux héritage qu’il s’agissait de répudier. Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, sous l’influence de Fox et de Pitt, de Burke et de Grattan, l’édifice des lois pénales est battu en brèche : pendant la première moitié du XIXe siècle il achève de s’écrouler. Par l’acte de 1778, les catholiques recouvrent le droit de contracter des baux emphytéotiques ; par le même acte ils sont replacés sous l’empire du droit commun en matière de successions. L’acte de 1782 leur restitue le droit d’acquérir la terre ; l’acte de 1793 leur rend la capacité électorale ; l’acte de 1829 enfin leur rouvre l’entrée du parlement. Nous avons raconté dans d’autres articles l’histoire de ces réformes successives. Cependant, malgré l’adoucissement incontestable de la législation établie sous Guillaume III et sous la reine Anne, le régime de la propriété, en Irlande, ne s’était pas sensiblement modifié dans la pratique. Quoique les catholiques eussent recouvré le droit d’acquérir des terres, ils n’avaient que peu d’occasions d’en profiter. La plupart des grands domaines, grâce au droit d’aînesse et aux substitutions, étaient immobilisés entre les mains d’un petit nombre de familles protestantes. Beaucoup de propriétaires étaient obérés ; ils avaient emprunté pour une valeur égale ou supérieure à celle de leurs terres. Dans cette situation, ils ne touchaient plus leur revenu, gage de leurs créanciers ; ils ne pouvaient faire aucune amélioration ; ils étaient entraînés à écraser leurs fermiers par des augmentations de redevances. La vente de leurs terres aurait été un avantage pour eux, pour leurs créanciers, pour leurs fermiers. Malheureusement la plupart de ces domaines étant substitués, leur aliénation était extrêmement difficile.