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demander ouvertement à la diète fédérale une reconstitution de l’Allemagne sans la participation de l’Autriche. Cette puissance exerçait dans la diète une influence trop positive sur les gouvernemens des états secondaires pour qu’il y eût chance de l’exclure pacifiquement avec le concours des princes. Avec un parlement issu du suffrage universel, l’opération présentait moins de difficultés, sous l’effet des excitations du parti national, qui n’entendait pas confier les destinées de l’Allemagne unifiée à un gouvernement hétéroclite, inspiré par les conseillers non allemands. La question de Sleswig, la succession des duchés de l’Elbe et l’exécution fédérale demandée par la diète, où l’Autriche se joignit à la Prusse pour une action commune, vinrent à point pour favoriser les projets prussiens. Au milieu de discussions interminables, habilement entretenues, sur la souveraineté des duchés de Holstein et de Lauenbourg, discussions dont l’Autriche devait sortir dupe, aptes avoir servi de complice dans la spoliation et le démembrement du Danemark, l’envoyé prussien demanda à la diète de Francfort, le 9 avril 1866, de convoquer par voie d’élections directes et au suffrage universel un parlement qui représenterait la nation allemande tout entière, afin de statuer sur les réformes en question, à propos des changemens à introduire dans la confédération. Le mémoire du mois de septembre 1863 revenait ainsi sur le tapis, après un peu de temporisation, tandis que M. de Bismarck faisait une vive critique de l’organisation fédérale dans ses circulaires aux représentans de la Prusse auprès des puissances. L’état de choses existant ne pouvait se prolonger sans préjudice pour la communauté, et une réforme devenait indispensable. Cette réforme de l’organisation fédérale, suivant les notes de Berlin, devait être réalisée d’un commun accord entre les gouvernemens confédérés et une assemblée nationale, exprimant la volonté du peuple allemand. Isolément aucun des deux facteurs, ni le parlement élu par la nation, ni les gouvernemens représentés à la diète, ne serait en mesure de résoudre ce problème. Il y eut circulaire sur circulaire. Une déclaration suivait l’autre, vive, pressante, impérieuse. Lorsque la commission spéciale, nommée par la diète pour examiner les propositions de la Prusse, se réunit, le plénipotentiaire prussien précisa les termes des mesures à prendre : convocation d’une assemblée nationale, fixation de la compétence des organes de l’Union reconstituée, organisation d’un service consulaire commun pour toute l’Allemagne, création d’une marine de guerre allemande, révision de l’organisation militaire de la nation.

Toutes les dispositions essentielles de la constitution de l’Empire actuellement en vigueur se retrouvent dans ces propositions, soit en termes explicites, soit en germe, se résumant dans l’organisation de l’armée allemande entre les mains de la Prusse, avec la création