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strophe du Grand-Électeur, un des plus forts cuirassés de la marine allemande, coulé par suite d’une collision survenue en plein jour et par un temps calme, donne à réfléchir sur l’expérience nautique de ses officiers.

Presque tous les états allemands tirent un revenu considérable de leurs biens domaniaux. En Prusse, un quart et plus des recettes publiques provient de propriétés domaniales, et si dans les petites principautés de Lippe-Detmoldt et de Reuss les contribuables n’acquittent pas plus de 10 à 15 francs d’impôts annuels par tête d’habitant, cela tient aux ressources que tire l’état de son domaine. L’Empire ne jouit pas des mêmes avantages. À moins de considérer comme un domaine commun le territoire de l’Alsace-Lorraine, les états de l’Union, ou l’Empire, ne possèdent en communauté que le réseau des chemins de fer existant sur le territoire du pays annexé. Ce réseau en)brasse aujourd’hui un développement d’une étendue de 1,130 kilomètres, qui n’a pas coûté moins de 423,498,l95 marcs, valeur du matériel d’exploitation y compris. C’est beaucoup, eu égard à l’extension des lignes. C’est même plus que la valeur réelle, pour quiconque sait que le réseau de la compagnie française de l’Est a été payé 325,000,000 francs. pour une longueur de lignes de 840 kilomètres seulement. Les frais de premier établissement montent bien moins haut ; mais sous l’éblouissement des milliards pris à la France, on a puisé sans compter, comme font des parvenus enrichis en dehors de toute attente, dans un trésor en apparence inépuisable. Aussi a-t-il bientôt fallu recourir à l’emprunt pour continuer l’extension du réseau conformément aux demandes de l’état-major et pour répondre aux exigences de la stratégie. En dehors du réseau de l’Alsace-Lorraine, l’Empire ne possède point d’autres lignes ferrées en propre, mais il a accordé néanmoins une subvention de 30 millions de francs pour la percée du Saint-Gothard, en vue des intérêts allemands. Si le prince de Bismarck disposait des crédits nécessaires, il userait certainement de toute son influence pour effectuer le rachat de tous les chemins de fer allemands au compte de l’Empire. Faute de fonds, il se résigne à attendre et à pousser au rachat par l’état prussien des chemins de fer de la Prusse, malgré les résistances qu’il rencontre pour la réalisation de cette mesure au sein même du ministère, obligeant ses collègues assez hardis pour lui opposer des objections financières à choisir entre l’alternative de se soumettre à ses vues ou de se démettre. D’ailleurs, la législation des chemins de fer en Allemagne dépend dès maintenant de l’Empire. L’office central de Berlin surveille attentivement l’administration des voies ferrées pour les états particuliers, non moins que chez les compagnies privées. L’article 47 de la constitution stipule que « toutes les administrations de chemins de fer devront faire droit, sans objection, aux