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qui puisse juger équitablement[1]. » Sans s’arrêter à cette supplique, Charles IX, par de nouvelles lettres datées de Châteaubriant, le 25 octobre 1565, interdit au parlement de poursuivre. Françoise de Rohan était condamnée à l’avance. Le 6 novembre 1565, l’archevêque de Lyon, assisté des dix assesseurs triés par lui, repoussa les conclusions de la plaignante. Dès qu’elle eut connaissance de cette triste victoire, Catherine s’empressa de l’annoncer à la duchesse de Guise : « Je vous veux bien dire qu’il ne tiendra qu’à vous que soyez mariée, car M. de Nemours a gagné son procès ; de quoi je suis bien aise pour le voir hors de la peine qu’il étoit. »

Non-seulement en France, mais en Italie, l’opinion prit fait et cause pour Françoise de Rohan si vivement, que le duc de Nemours se vit presque contraint d’en écrire au duc de Florence : « Mon cousin, lui mande-t-il, j’ai été depuis longtemps calomnié pour raison du procès qui étoit pendant entre la demoiselle de Rohan et moi à cause du mariage qu’elle prétendoit et que vous avez pu être en doute qui avoit tort en cela ; depuis, par une sentence définitive donnée par M. L’archevêque de Lyon, j’ai été absous à plein de sa demande inique, dont je vous ai bien voulu avertir pour vous faire certain du repos où je suis aujourd’hui, après avoir été travaillé sept ans au dit procès[2]. »

Le duc, en parlant de ce repos qu’il croyait avoir conquis, se trompait étrangement. Loin de se décourager, Françoise sollicita et obtint du parlement, le 4 décembre suivant, un relief d’appel qu’elle fit signifier au duc alors à Moulins, mais la résistance lui devenait de plus en plus difficile. Sous la double pression des Guises et du duc de Nemours, Charles IX, le 20 janvier 1566, réitéra ses défenses au parlement. Soutenue par cette énergie qu’elle puisait dans le sang des d’Albret, Françoise somma le greffier de l’official de Paris d’avoir à déclarer où étaient les pièces du procès. Il répondit qu’elles avaient été portées à Lyon. Mlle de Rohan se trouvait ainsi désarmée, lorsqu’elle fut citée à comparaître à Monceaux, le 20 avril 1566, devant le conseil privé. Le résultat était prévu : le jugement de l’archevêque de Lyon fut confirmé, sous la réserve toutefois laissée à Françoise d’en appeler au pape. Dès le lendemain, le contrat de mariage du duc et de la duchesse était préparé et Catherine s’obstinant dans son hostilité contre la pauvre Françoise, écrivait à Renée de France, la mère de la duchesse de Guise : « Le roi mon fils a ce mariage si agréable pour lui être tous deux parens si proches, surtout Madame, qu’il lui donne cent mille livres. »

Le dimanche 5 mai, toute la cour en habits de gala était rassemblée

  1. Bibl. nat., fonds français, no 6696.
  2. Archives de Médicis. Florence, filza 4726, page 216.