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nous voulons seulement appeler l’attention de nos lecteurs sur deux points qui n’ont pas été suffisamment mis en lumière lors de la dernière discussion générale et qui, à notre avis, ont une grande importance. Il s’agit de la question du dégrèvement et de celle de l’amortissement.


I

Sur le premier point, M. le ministre des finances a dit, dans l’exposé des motifs du budget de 1883, qu’il n’y avait pas de politique de dégrèvement, qu’il n’y avait qu’une politique d’équilibre, qui peut conduire au dégrèvement. Qu’est-ce d’abord qu’une politique d’équilibre ? Quand y a-t-il équilibre dans le budget ? Est-ce quand on a satisfait toutes les demandes, doté très largement les travaux publics, et accordé des subventions sous toutes les formes ? À ce compte, la politique d’équilibre sera bien difficile à réaliser, et nous doutons qu’on y arrive jamais. On a vu que, depuis 1850, les seules dépenses administratives avaient augmenté de 600 millions, et cela ne suffit pas. Nous allons plus loin que M. le ministre et nous ne craignons pas de déclarer que si, par impossible, on venait à satisfaire toutes les demandes et qu’il y eût encore des excédens de recettes, il faudrait les employer à autre chose qu’à des dégrèvemens. On dit bien qu’après la guerre, 750 millions d’impôts nouveaux ont été établis ; qu’on en a déjà aboli pour 300 millions, qu’il en reste encore pour 450 ; et, tant que ceux-ci subsisteront, on pense que le premier devoir est de songer au dégrèvement. — Ce n’est pas notre avis. On oublie que, par la suite de la guerre aussi, une autre surcharge a été créée qui a son importance. Avant 1870, la dette publique, déjà lourde, était de 13 à 14 milliards, elle monte aujourd’hui à 21 ou 22, sans parler de la dette flottante ni du compte de liquidation. Le service en intérêts de cette dette, sous ses diverses formes et en y comprenant les dotations, absorbe 1,350 millions, presque la moitié de notre budget ; il nous semble que c’est là une charge énorme qui appelle l’attention. Et quand on pense que, dans cette situation, il s’est trouvé naguère au sein de la chambre des députés, une majorité pour prendre en considération une mesure qui ne tendait à rien moins qu’à priver le trésor de 300 millions de ressources, en abolissant en partie l’impôt des boissons et celui des octrois, on est confondu de surprise, et on se demande quelle idée a cette chambre des nécessités financières. En fait de dégrèvemens, on peut tout au plus se permettre ceux qui ne font rien perdre au trésor et qui sont compensés bien vite par une plus-value à peu près équivalente. Il y en a quelques-uns de ce genre. Si on abaissait, par exemple, sensiblement