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chambre froide, on détermine deux courans opposés, car, en bas, la flamme d’une bougie est entraînée vers la pièce chaude et en haut vers la pièce froide. On peut donc faire tous les jours une expérience qui réalise en petit le phénomène des courans contraires, et les physiciens s’en sont tenus à cette démonstration, qui semble sans réplique ; mais pourquoi n’a-t-on jamais constaté sous les tropiques ce mouvement ascensionnel de l’air dont on parle toujours comme d’un fait avéré ? Un météorologiste distingué, M. Tarry, a proposé d’étudier les courans ascendans à l’aide de girouettes d’une forme spéciale, semblables aux banderoles qui sont placées au haut des mâts ; M. Faye a fait observer à ce propos que les flammes d’ordre ou d’armement de nos navires auraient déjà fait reconnaître cent fois de tels courans s’ils existaient.

Il y a là évidemment une difficulté à laquelle se heurte la théorie du tirage équatorial, et, en attendant que l’existence des courans ascendans soit démontrée par l’observation, il me paraît plus rationnel d’admettre avec M. Faye que les vents permanens sont dus au soulèvement des couches supérieures, qui est la conséquence immédiate de la dilatation des couches voisines du sol, gonflées par la chaleur. L’équilibre, troublé par cet exhaussement local des couches de niveau, tend à se rétablir par l’écoulement de l’air vers les régions plus froides ; mais, ces régions ayant reçu en surcharge la masse d’air dont la région centrale se trouve allégée, leurs couches inférieures tendront à prendre un mouvement inverse, et il en résultera des courans dirigés vers l’équateur. C’est pour la même raison, comme l’a fait remarquer M. L. Teisserenc de Bort, que souvent le baromètre tombe en même temps que la température s’élève, et alors le vent marche du lieu le plus froid vers le lieu le plus chaud. Ce phénomène est très apparent dans le régime des vents particulier à l’Espagne.

Quoi qu’il en soit d’ailleurs de ces explications théoriques, les courans permanens qui forment les alizés et les contre-alizés existent. Ils ne sont pas tout à fait aussi réguliers que le veut la théorie un peu sommaire que nous venons de rappeler : leurs allures sont modifiées par des circonstances locales, surtout dans le voisinage des côtes, et la zone des calmes équatoriaux qui les sépare se déplace et oscille avec les saisons. Enfin il est clair qu’on ne peut concevoir un échange régulier d’air entre l’immense région intertropicale et les parallèles de plus en plus rétrécis des hautes latitudes ; les deux circuits principaux doivent être renfermés dans une zone limitée par des latitudes moyennes où les courans supérieurs, les contre-alizés, se rapprochent du sol. Il est difficile de se faire une idée nette de la manière dont s’opère cette inversion, cette descente des courans supérieurs de retour, qui sont pour nous des vents de