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centre, où la fureur de la tempête s’éteint subitement ; sur les deux bords du calme central soufflent des vents de directions diamétralement opposées. Le sens de la rotation de ces tourbillons est constant pour chaque hémisphère : sur l’hémisphère nord, le mouvement de l’air a lieu de droite à gauche (en sens inverse de celui des aiguilles d’une montre), et de gauche à droite (dans le sens des aiguilles) sur l’hémisphère sud. De là, pour notre hémisphère, la règle de Buys-Ballot : « Tournez le dos au vent, étendez le bras gauche, le centre est dans cette direction. » Ce serait le bras droit, pour l’hémisphère opposé. Mais ces tourbillons ne tournent pas sur place : ceux qui naissent dans les régions tropicales parcourent des trajectoires paraboliques qui s’infléchissent d’abord vers l’ouest, puis montent vers les pôles pour revenir ensuite vers l’est, des paraboles ne sont peut-être que des portions d’un circuit fermé, légèrement elliptique, où les tourbillons flottent ainsi que des bouées entraînées par un cours d’eau. Les tornades de l’Amérique du Nord suivent d’autres routes ; mais, pour chaque région du globe, l’itinéraire de ces redoutables visiteurs varie assez peu. La vitesse de leur mouvement de translation est en moyenne de 30 ou 40 kilomètres, mais elle peut être beaucoup plus grande. Une conséquence de ce déplacement rapide des tourbillons, c’est que les vents sont plus forts dans le demi-cercle où la vitesse de rotation s’ajoute à la vitesse de translation, que dans le demi-cercle opposé, où les deux vitesses sont de sens contraires : le tourbillon a un bord maniable et un bord dangereux (pour notre hémisphère, c’est le demi-cercle situé à droite de la trajectoire). Les manœuvres recommandées aux navires qui se trouvent sur la route d’un cyclone ont pour but d’éviter le passage du centre et de fuir le bord dangereux. Quant à la distance à laquelle on se trouve du centre, il faut tâcher de la conclure de la marche du baromètre, qui baisse d’une manière continue depuis la circonférence jusqu’au centre, où s’observe le minimum. Dans certains cas, la dépression barométrique a dépassé 50 millimètres.

« Il faudra connaître les runes de la tempête, dit la Volsunga-Saga, si tu veux garder saufs, dans la baie, tes coursiers à voiles ; il faut les graver sur la carène et le gouvernail. » L’homme de mer les connaît désormais suffisamment pour ne plus se trouver désarmé en face des redoutables météores qui le guettent sur sa route ; avec un peu d’expérience, il est en état de juger la distance et la direction de son ennemi et parvient à lui échapper. Le commandant Bridet termine ainsi la préface de sa célèbre Étude sur les ouragans de l’hémisphère austral, destinée aux marins : « Je n’ai plus qu’à leur recommander vigilance et foi aveugle, ils se riront de la fureur des vents qu’ils auront appris à maîtriser, et ils affronteront sans