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des cas causer des désordres encore plus fâcheux que le retardement du travail. » Encore, à son époque, dans les armemens et les réparations, le navire restait-il immobile ; tous les objets à son usage facilement transportables lui étaient amenés ; une vicieuse distribution de matériel n’augmentait que les parcours sur les voies de l’arsenal, et on suppléait à tout par un renfort de travailleurs. Aujourd’hui, les principaux objets de matériel naval sont de telles dimensions et de tels poids qu’ils ne se meuvent pas sans l’aide de puissans appareils, et ces appareils s’élèvent près des ateliers où chaque espèce de matériel est réparée ou entretenue. Aussi est-ce le navire qui se déplace pour recevoir ou rendre ce chargement dans les différentes parties du port. Dans les jours d’activité et dans les arsenaux qui abritent de nombreux navires, on comprend quel désordre entraînent ces mouvemens, soit que les services soient enchevêtrés, soit que les mêmes soient dispersés sur plusieurs points, soit qu’ils n’occupent pas les uns par rapport aux autres un ordre rationnel.

Cet ordre rationnel est facile à déterminer entre les services de réparation et ceux d’armement. Les réparations, longues pour peu qu’elles soient importantes, exigent que le navire soit mis au bassin, dépouillé de son artillerie, de sa machine. Les armemens, les ravitaillemens sont plus fréquens et plus rapides. Il ne faut pas que les navires hors de service obstruent les mouvemens des bâtimens actifs. La partie destinée aux réparations doit être le fond du port. À plus forte raison, les constructions doivent-elles être établies loin des centres d’armement et près des bassins de radoub : disposition d’autant plus nécessaire que les travaux neufs et les réparations emploient le même personnel et le même outillage.

Aux armemens appartiennent les parties antérieures du port. Quand le navire construit ou réparé descend vers la mer, il faut qu’il trouve sur son passage son matériel dans l’ordre où il le doit embarquer. Près des ateliers de réparation, les machines et l’artillerie, puis les chaînes et les ancres, les mâtures et gréemens, les objets de rechange, enfin, à l’entrée, les vivres, le charbon. Ce groupement rapproche ou éloigne le matériel de l’entrée du port à proportion qu’il est plus ou moins fragile et consommable. Un navire, pour changer quelque Chose à son artillerie ou à ses moteurs, sera obligé de remonter jusqu’à l’arrière-garde : mais il est rare que les canons et les machines ne durent pas autant que l’armement. Au1 contraire, le charbon et les vivres sont l’approvisionnement qui disparaît le plus vite et se renouvelle le plus souvent dans une campagne ; d’ordinaire ils manquent seuls au navire qui vient les chercher, et tous les bâtimens en ont besoin. Voilà pourquoi il convient que le charbon et les vivres s’offrent