propres intérêts. À ce point de vue, on a pourtant peine à s’expliquer que la sagesse divine, qui a déployé tant de merveilleuse intelligence dans la coordination des organes du plus chétif insecte, ait montré tant d’indifférence apparente dans la combinaison des élémens qui concourent au développement général de la vie organique à la surface de ce globe terrestre, où bien des choses semblent en fait livrées au hasard.
Je sais qu’il est d’usage de soutenir l’opinion contraire, de faire ressortir notamment harmonieux accord des grandes lois physiques qui président à la diffusion de la chaleur et de l’humidité atmosphériques, etc. Certainement on pourrait imaginer plus mal que ce qui est. Nous avons vu, par exemple, qu’il suffirait d’un bien simple accident géologique, de la fermeture du détroit du Gibraltar, pour frapper de stérilité complète ce vaste bassin de la Méditerranée dont plus des trois quarts sont déjà à l’état de désert.
L’homme n’en considère pas moins le globe terrestre en entier comme son domaine. De tous les êtres organisés il est, en effet, le seul qui, paraît-il, puisse s’adapter à tous les climats et à tous les milieux, vivre tour à tour sous la hutte de glace du Lapon ou la tente de toile du Saharien. Mais il ne suffit pas de respirer à la surface du globe, il faut s’y nourrir. La terre qui nous porte doit aussi subvenir à notre alimentation ; et, à cet égard, on ne saurait disconvenir que tout n’est pas pour le mieux et qu’il y a beaucoup d’espace et de forces perdues.
Les terres émergées n’occupent pas plus du quart de la surface totale du globe ; et c’est à peine si celles qui sont réellement habitables représentent une égale proportion. Pour ne citer qu’un exemple, ne voyons-nous pas ce magnifique bassin polaire, vers lequel convergent les plus grandes, vallées de l’ancien et du Nouveau-Monde, rempli d’îles et de presqu’îles aux formes variées, découpé dans tous les sens par d’innombrables bras de mer, qui sembleraient appeler à eux le commerce et l’industrie, — à tout jamais enseveli sous les glaces, servir de refuge aux ours blancs et aux veaux marins, qui, mieux que nous, pourraient revendiquer comme leur appartenant en propre ce domaine terrestre. Et parmi les contrées les plus favorisées du climat, où l’homme a toujours résidé de préférence, sous ces cieux démens de la Grèce, de l’Italie, de la France et de l’Espagne, combien n’est-il pas de terres qui, a l’état de plateaux arides, de montagnes rocheuses, de landes sablonneuses ou caillouteuses, de marécages et de lagunes, se refusent à toute production végétale ?
Mais, par cela même que son domaine terrestre est plus réduit, plus incomplet, l’homme doit se préoccuper de l’améliorer et d’en accroître la surface utile ; son intelligence lui permet d’entrevoir le