Le Crédit foncier s’est décidé, comme nous le prévoyions il y a quinze jours, malgré l’état toujours précaire du marché, à faire à l’épargne, dans la seconde quinzaine de janvier, un appel d’une certaine importance puisqu’il s’agit, en capital, de 200 millions de francs, et, en titres, de 600,000 obligations de 500 francs prix nominal, rapportant 15 francs d’intérêt annuel et remboursables au pair.
Le prospectus officiel relatif à cette émission n’a pas encore été publié à l’heure où nous écrivons; mais toutes les conditions de l’opération ont été arrêtées vendredi et on peut considérer comme un point acquis que c’est à 330 francs que les nouvelles obligations foncières vont être offertes au public. Ce prix n’a pas été fixé sans hésitation. Il avait été question d’abord d’une émission à 350 francs. D’une part, le Crédit foncier tenait à obtenir du public prêteur les meilleures conditions possibles pour n’avoir pas à imposer lui-même à ses emprunteurs des charges trop onéreuses ; d’autre part, il importait d’éviter un trop grand écart entre le prix des nouveaux titres et celui des obligations de nos grands chemins de fer, dont ils reproduisent exactement le type.
Il a fallu cependant renoncer à ce prix de 350 francs. La clientèle d’obligataires du Crédit foncier a trop perdu en capital sur les deux émissions colossales de 1879 et de 1880 pour qu’il fût sage de laisser, dans l’émission actuelle, une chance quelconque de moins-value une fois la souscription close. L’épargne aurait pu même se montrer hésitante à l’avance et ne prendre qu’une faible partie de l’emprunt. Un tel insuccès non-seulement aurait été préjudiciable au Crédit foncier, mais encore aurait ajourné à une date indéterminée toutes les espérances d’un réveil des affaires financières et d’un retour d’activité sur le marché. Il fallait que la souscription du Crédit foncier, la première opération considérable tentée à Paris depuis le krach de janvier 1882, fût un succès décisif, et le Crédit foncier a pris le meilleur et le plus sur moyen pour assurer ce résultat, en abaissant hardiment le prix de souscription à 330 francs, c’est-à-dire à un niveau qui ne laisse plus