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est trop connue, le moyen de sortir d’embarras est trop indiqué pour qu’il y ait profit à s’entourer de réserves et à pratiquer les sous-entendus dans une discussion qui est ouverte, depuis plusieurs années, devant le parlement et dans la presse. Oui, il est nécessaire que l’entente s’établisse entre l’état et les compagnies : cela est nécessaire dans l’intérêt de l’état, mais ce serait une erreur de croire que les compagnies ne soient point également intéressées à cette entente et qu’elles puissent abuser des circonstances en tenant, comme on dit vulgairement, la dragée haute, dans la préparation des futurs contrats. De par les cahiers des charges elles sont, beaucoup plus que l’on ne parait le croire, sous la dépendance et sous le contrôle du gouvernement, qui peut, en maintes occasions, pour les nombreux détails du service, leur faire sentir sa main lourde. Elles n’ont pas, elles ne sauraient avoir l’esprit de résistance contre une autorité qu’elles rencontrent à chaque pas devant elles et qu’il leur importe de ne point heurter ; elles connaissent la fable : le Pot de terre et le Pot de fer. Par conséquent, il n’y a pas à craindre que, de leur côté, le sentiment de conciliation ne soit point sincère ; elles ne prétendront pas traiter avec l’état comme avec un égal : leurs observations, leurs objections ne pourront s’inspirer que de l’intérêt commun qui a créé, dès l’origine, l’association des compagnies et du budget pour l’organisation du grand service des transports.

Les compagnies sont dans une situation prospère, attestée par le cours de leurs actions ; le cours des obligations démontre également la valeur de leur crédit. Cette prospérité et ce crédit ne sont pas uniquement dus à une administration habile et intelligente : ils procèdent également des subventions, des garanties d’intérêt, du système de concentration qui a supprimé la concurrence. S’il est vrai que les sacrifices consentis par l’état n’ont eu en vue que l’intérêt général, il n’en reste pas moins que les capitaux engagés dans les chemins de fer en ont grandement profité. Il est équitable dès lors que, pour la solution des difficultés avec lesquelles l’état se trouve aux prises, le concours des compagnies s’offre libéralement. A cet effet, les négociateurs pourront emprunter aux conventions de 1859 le principe, sinon les termes exacts, des combinaisons par lesquelles, en réservant aux actionnaires les revenus acquis, il sera pourvu à l’extension nouvelle du réseau des chemins de fer sans que le trésor ait à supporter d’autres charges que le paiement annuel d’une garantie d’intérêt et le remboursement au moins partiel, et plus ou moins prolongé, des pertes de l’exploitation sur les lignes du troisième réseau. Ces charges, il ne faut pas le dissimuler, seront lourdes, surtout pendant la première période ;