nombre de nos députés n’ont de goût que pour les jeux d’enfans, pour les viandes creuses et pour les choses inexistantes.
Il y a des folies contagieuses; la chambre a communiqué la sienne au gouvernement. Un peu de sang-froid, un peu de bon sens, il n’en fallait pas davantage pour apaiser ce grand tumulte, pour rafraîchir ces cervelles échauffées; il suffit de jeter en l’air, — c’est Virgile qui nous l’apprend, — une poignée de poussière pour faire entendre raison à des abeilles qui se fâchent. Malheureusement tout le monde a manqué de bon sens et de sang-froid. On a raconté que, quelques jours avant de placarder son manifeste, le prince Napoléon le fit lire à l’un de ses amis, qui lui dit simplement : « Monseigneur, êtes-vous prêt à monter à cheval? — Je n’ai ni cheval ni selle, répondit le prince. — Alors n’affichez pas. » Le gouvernement savait mieux que personne que l’auteur du manifeste n’avait ni selle ni cheval et que ce n’est pas assez d’un pétard pour faire sauter la France. Il ne tenait qu’à lui de regarder d’un air de sérénité méprisante une tentative sans conséquence, plus propre à étonner le pays qu’à l’émouvoir ou à l’effrayer. Que si, au contraire, il jugeait convenable de faire un exemple qui servît d’avertissement, personne ne l’eût blâmé de prouver par un acte d’énergie que tout gouvernement a le droit de se défendre, et que les prétendans ne sont admis à résider sur le territoire français qu’à la condition de s’y considérer comme de simples citoyens et de garder pour eux leurs espérances comme leurs souvenirs.
On n’a été ni méprisant ni énergique. Les oies qui gardent le Capitole s’étaient mises à crier à pleine gorge pour appeler du secours ; on n’a pas voulu rester en arrière, on a crié comme elles, quoiqu’on ne partageât point leurs alarmes, et, au lieu d’en finir d’un seul coup avec un incident fâcheux, on a entrepris de légiférer sur une matière qui n’est pas du domaine de la législation. La loi de proscription qu’on proposait était destinée à frapper de la même peine et celui qui avait attenté à la paix publique et ceux, qui n’ont jamais dit un mot ni fait un geste pour la troubler. Ils étaient princes, eux aussi, et partant suspects. Il est même arrivé cette chose singulière qu’on n’a pas tardé à oublier le coupable pour s’acharner sur les innocens. Dieu sait qu’ils n’ont ni le génie ni le goût des conspirations, des complots ténébreux. Leur humeur s’y oppose, ainsi que leurs traditions libérales, leur soumission aux volontés du pays, qui ne s’est jamais démentie, et l’éloignement que, par une sorte d’infirmité naturelle, ils ressentent pour ces déterminés coquins de qui dépend le succès des mauvais coups.
Ceux qui avaient juré de proscrire des princes dont la conduite a toujours été correcte s’en prenaient à leurs intentions secrètes ; ils les accusaient de se dire tout bas : « Si par la grâce du ciel ou par les fautes des républicains la république se rend impossible, peut-être