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Page:Revue des Deux Mondes - 1883 - tome 56.djvu/826

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qui peut parfaitement arriver et arrive en effet dans les départemens riches). Pour ne parler que des deux départemens cités par M. Richet, il faudrait savoir si, dans le département des Basses-Alpes, la propriété n’est pas ainsi divisée qu’elle assure à la grande majorité des habitans un certain degré d’aisance relative dans une contrée où la vie est à bon marché, les mœurs simples, et, d’un autre côté, si, dans le département du Nord, le grand nombre des naissances se répartit également entre la classe riche et la classe ouvrière plus ou moins misérable qui fait marcher les manufactures. Il est probable que les documens statistiques qui concernent le département du Nord sont trop sommaires pour permettre de s’en assurer ; mais il est un département ou plutôt une ville où cette vérification est possible : c’est Paris, et ceci va nous ramener précisément à ce qui a été le point de départ de cette dissertation trop longue : l’influence du grand nombre des enfans sur la misère.

L’Annuaire statistique de la ville de Paris pour 1881, publication très bien conçue et à laquelle j’aurai souvent l’occasion de puiser, contient un tableau indiquant quelle est, par arrondissement, la proportion d’enfans de un jour à cinq ans sur 10,000 habitans. Un coup d’œil jeté sur ce tableau montre que les deux arrondissemens de Paris où cette proportion est la plus élevée sont le XIXe (La Villette) et le XIIIe (Les Gobelins), le premier avec 990 et le second avec 957 enfans sur 10,000 habitans. Or, si nous nous reportons au tableau des arrondissemens de Paris classés d’après le relevé proportionnel de la population indigente, nous voyons que, sur cette liste, le XIXe arrondissement occupe le troisième rang, avec 1 indigent sur 9 habitans, et que le XIIIe arrondissement occupe le premier rang, avec 1 indigent sur 6 habitans. Le rapprochement est péremptoire. Il le serait, suivant toute probabilité, davantage encore et le plus pauvre des arrondissemens de Paris, le XIIIe, serait vraisemblablement celui qui compterait le plus d’enfans si sa population ne comprenait les 3,000 vieilles femmes ou folles enfermées à la Salpêtrière, qui comptent dans le recensement des habitans, mais ne sauraient compter au point de vue des naissances.

Faisons maintenant la contre-épreuve. Quels sont les arrondissemens de Paris qui comptent la moindre proportion d’enfans ? Ce sont le VIIIe arrondissement, celui des Champs-Élysées, et le IXe, celui de l’Opéra, le premier avec 397, le second avec 452 enfans de un jour à cinq ans sur 10,000 habitans. Or ces deux arrondissemens sont précisément les deux circonscriptions de Paris où l’on rencontre le moins d’indigens. la démonstration est donc irréfragable, et de quelque côté qu’on examine la question, on arrive au même résultat. Les chiffres que je viens de donner comprennent tous les enfans, légitimes ou illégitimes. Prenons maintenant le chiffre des