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Page:Revue des Deux Mondes - 1883 - tome 57.djvu/602

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LE
SALON DE 1883

Il convient toujours d’appeler d’un jugement général rendu à l’ouverture du Salon. La première impression que donne un Salon est le plus souvent fâcheuse. On est étourdi par la multitude des tableaux et comme aveuglé par les crudités de ton des peintures fraîches. C’est la confusion d’un kaléidoscope. Tout d’abord on ne distingue rien nettement. Puis les mauvaises toiles, qui sont d’ailleurs en majorité, s’imposent au regard par leurs couleurs criardes, leur composition bizarre ou ridicule ; et c’est à grand’peine, au contraire, que l’on aperçoit quelques bons tableaux, car les yeux, vite fatigués, ne regardent plus que machinalement. Par la raison qu’on veut tout voir, on ne voit rien. La comparaison avec les autres Salons vient alors à la pensée, et comme l’on n’a conservé de ces Salons-là que le souvenir des belles œuvres, — celui des choses médiocres s’étant naturellement effacé, — on juge que le Salon actuel est inférieur aux précédens. A une seconde, à une troisième visite, le jour se fait dans le chaos, les idées se modifient. On découvre beaucoup de tableaux de mérite qui ont échappé à la rapide inspection du premier jour, et dans les tableaux qu’on a déjà remarqués on admire de nouvelles beautés. Il se produit un phénomène de sélection visuelle. Si