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fait donne la mesure du terrain gagné par les américanistes depuis le congrès de Bordeaux. On a pensé à la résistance pour la première fois lorsque celle de l’otello a été mise en doute. M. Sabatier a vivement intéressé l’assemblée en parlant des sentimens généreux et humanitaires qui l’avaient porté à se dessaisir, en faveur d’un acheteur ardent, de mille otellos boutures second choix au prix modéré de 1,500 francs le mille ! Il est vrai qu’il avait gardé pour lui son premier choix ; il n’a, dit-on, planté trois cent milieu. M. le docteur Despétis a contesté la résistance de cet hybride, mais son terrain ingrat est la pierre de touche des résistons. Les otellos de M. Guiraud ont déjà neuf ans et, en général, les gens qui en possèdent peu voudraient en posséder davantage. Étant de ce nombre, je n’ai pas craint de le dire, car, de ma place, j’oublie le Taceat mulier qui me domine dans les grandes assemblées, où la majesté d’une tribune me rappelle cet article de foi que la femme est née pour travailler, servir et se taire.

M. Gaillard (du Rhône) a, selon son habitude, donné sur les hybrides des renseignemens précieux, et cela avec simplicité et concision ; aussi sa place a-t-elle été honorablement marquée au congrès de Montpellier, comme elle l’avait déjà été à celui de Bordeaux. Tous les hybrides connus ont été passés en revue. On a fait plus pour le montéfiore, car les quelques boutures disponibles ont été achetées à des prix fabuleux. J’en ai emporté une comme trophée et comme souvenir, — trophée, parce que le montéfiore est un semis du taylor si honoré à Saint-Benezet, — souvenir, parce qu’elle m’a été donnée par un aimable compagnon de route et voisin.

La séance consacrée à la greffe peut se résumer ainsi : la greffe en fente sur place convient à la région de l’olivier parce qu’étant tardive, elle coïncide avec une saison chaude et lumineuse. Le plant raciné greffé sur table et soudée en pépinière convient à la Gironde, où le temps humide et couvert protège ses premières feuilles, tout en menaçant son âge mûr de mildew et d’anthracnose. On peut dire d’une façon générale que ce qui fait réussir un système fait échouer l’autre, leurs conditions de prospérité étant diamétralement opposées. La greffe-bouture semble plus théorique que pratique ; chez elle il y a cumul de difficultés, sinon d’improbabilités. La greffe anglaise est plus solide que la greffe en fente simple. Par contre, les languettes trop minces de la greffe anglaise se désorganisent au centre du cep sans nuire à la soudure irréprochable de la circonférence. La greffe en fente simple, vue en coupe, semble plus rassurante, mais on peut supposer que la petite caverne centrale de la greffe anglaise perd beaucoup de ses terreurs quand elle est emprisonnée dans une soudure extérieure aussi parfaite que celle examinée au congrès.