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COLIGNY

I.
LA PREMIÈRE GUERRE DE RELIGION EN FRANCE.

Gaspard de Coligny, amiral de France, par M. le comte Jules Delaborde, 3 vol. Paris, 1882; Fischbacher.


Quand j’entends accuser le peuple français de légèreté, je pense involontairement à deux hommes, à Calvin, à Coligny. Il y a dans l’histoire de l’humanité peu de figures plus sérieuses, plus austères. Calvin et Coligny ont bu tous deux aux mêmes sources du pur évangile, ils ont eu les mêmes ambitions, les mêmes pensées, ils ont servi sous des costumes différens un maître plus puissant que tous les rois de la terre. Le théologien, sorti de l’ombre de la cathédrale de Noyon, Picard raisonneur et subtil, logicien sans merci, fut le guide spirituel de l’homme d’épée qui, par la puissance de son caractère bien plus que par la grandeur de sa maison, ou même par sa valeur guerrière, se fit bientôt reconnaître de tous comme le bras armé de la réforme française. On ne peut comparer un instant Coligny à ces membres d’une sorte de prolétariat princier qui, en Allemagne, avaient épousé les idées nouvelles pour s’en faire un instrument de domination ou de conquête, ni à ces grands qui, en France, n’aspiraient qu’à rendre les grands offices de la couronne héréditaires dans leur famille. A aucun moment de sa vie, il ne songea à se créer quelque souveraineté, comme fit plus tard le duc