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qu’on se trompe de route[1]. Pour une cause semblable, Matteucci voit le fer doux des appareils télégraphiques toscans s’aimanter fortement au point que tout service est interrompu entre Florence et Pise. Aux États-Unis, dans pareille circonstance, les employés réussirent à faire marcher le télégraphe sans pile.

Les beaux arcs de lumière qu’on observe dans les régions polaires ont leur point culminant sur le méridien magnétique. On nomme ainsi, comme on le sait, le plan vertical mené par les deux pointes d’une aiguille aimantée horizontale. Bravais, s’inspirant peut-être des idées d’Hansteen, en a conclu que ces arcs (ou plutôt les cercles dont ils font partie) sont concentriques à l’axe magnétique du globe, droite qui réunit les deux pôles magnétiques en passant par le centre de la terre. Les arcs ne coïncident donc pas en direction avec les parallèles géographiques, ce que croyaient les premiers observateurs, notamment le Suédois Bergman. Au reste, le pôle magnétique n’est nullement immobile, et sa position peut varier de plusieurs degrés en longitude ou en latitude dans le cours d’un siècle.

L’apparition des aurores boréales se rattache-t-elle à un état particulier de l’atmosphère? Oui, sans doute, et M. de La Rive voit dans cette circonstance une confirmation de sa théorie. Ainsi, presque tous les observateurs sont d’accord pour déclarer que des nuages de cirro-stratus accompagnent ou précèdent le phénomène et on en voit fort souvent à l’intérieur du segment obscur. Ce qui n’est guère moins incontestable, c’est la présence simultanée dans l’air d’une innombrable multitude de fines aiguilles de glace, transparentes et microscopiques, qui favorisent la formation de halos lunaires avant que l’aurore elle-même prenne naissance.

Nous sommes maintenant en mesure d’aborder l’explication de l’hypothèse proprement dite. La terre, d’après l’éminent physicien genevois, est chargée de fluide négatif; il en est de même des couches d’air très rapprochées du sol. Au contraire, les hautes régions de l’atmosphère sont électrisées positivement; et ce double fait, résultat d’expériences certaines, n’est nié par personne. Ces deux électricités de nom contraire, accumulées vers les tropiques en masses énormes, se combinent aux pôles, où l’air, plus humide, devient meilleur conducteur. Les décharges polaires produisent sans cesse des appels de fluide, s’il est permis de s’exprimer ainsi, et des courans d’électricité partent constamment de l’équateur vers

  1. Toutefois, si l’observateur se trouve en dedans du cercle formé par l’aurore, l’action de celle-ci sur l’aiguille est à peu près nulle. Ce fait assez singulier a été constaté plus d’une fois.