Il y a deux mois, dans sa séance du 1er août, le sénat discutait la
question du chemin de fer du Haut-Sénégal et le crédit de 4,677,000 fr.
que réclamait le ministre de la marine et des colonies pour continuer
la ligne de Kayes à Bafoulabé et pour achever les forts de protection
de Bafoulabé jusqu’à Bamako. Cette entreprise a été vivement attaquée et chaleureusement défendue. Mais défenseurs et attaquans, tout
le monde s’est trouvé d’accord pour rendre hommage à cette colonne
expéditionnaire forte de moins de cinq cents hommes, qui, après trois
laborieuses campagnes, a fait flotter le drapeau français sur les bords
du Niger. « Supposez, disait récemment M. de Lesseps au congrès
géographique de Douai, supposez une poignée d’hommes partant de
Calais pour pénétrer dans un temps donné jusqu’aux environs de Vienne
ou de Buda-Pesth. Trois fois de suite, en de rudes conditions, nos soldats ont pénétré au cœur du Soudan, conduits par un homme fortement trempé. Il s’est chargé de pousser jusqu’au Niger la ligne des
postes qui doit garantir notre influence. Les difficultés de détail ne le
rebutent pas plus que l’imprévu ne le déconcerte ou que le danger ne
l’émeut. La petite phalange est rentrée au Sénégal déguenillée, épuisée, hâve et réduite de plus du tiers; mais elle avait noblement, simplement accompli un grand acte. »
On peut affirmer, sans crainte d’être démenti par personne, que notre colonie du Sénégal est devenue ce qu’elle est par les soins infatigables