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Le comptoir de Mundi, — aujourd’hui l’IIe brûlée, — se trouve à deux journées de navigation de Malao. Le mouillage devant Mundi est plus sûr que devant les autres comptoirs, parce qu’il est abrité par une île peu éloignée de terre. On importe à Mundi les marchandises que nous avons déjà citées; on en exporte également celles dont nous avons donné plus haut la liste, et de plus une substance odorante connue sous le nom de mocrotou. Les marchands indigènes de Mundi sont de mœurs assez farouches. Si de ce comptoir vous faites route à l’est pendant deux ou trois jours, vous atteindrez un autre marché, Mosyllus, marché situé sur une côte sans abri et par cela même dépourvu de moyens de transport maritime. On importe à Mosyllus, qui doit avoir occupé l’emplacement que les cartes les plus récentes assignent au village de Guesele, les objets d’échange habituels, des vases d’argent, quelques ustensiles de fer et des verreries. On en exporte une grande quantité de cannelle commune, des résines odorantes et des aromates, du mocrotou inférieur à celui de Mundi, de l’encens et même, par occasion, de l’ivoire et de la myrrhe.

Deux autres journées de navigation vous feront dépasser l’embouchure d’un fleuve sujet à des crues comme le Nil, une plage bordée de brisans, un petit bois de laurier et vous conduiront enfin au promontoire de l’Éléphant, dont le nom moderne, moitié éthiopien, moitié arabe, Ras-el-Fil, garde encore la même signification. Non loin de ce cap est un grand bois de laurier que les indigènes ont nommé Acannæ. C’est le seul endroit où l’on puisse se procurer en grande quantité cette espèce d’encens connue dans le commerce sous le nom d’encens pératique, c’est-à-dire recueilli en dehors du détroit. Nulle part la qualité n’en est meilleure. En l’année 1517 de notre ère, l’amiral portugais Diego Soarès fit une apparition dans ces parages : il était envoyé contre les Turcs, qui préparaient alors en Arabie une expédition destinée à porter un corps de troupes dans l’Inde. Soarès échoua dans son entreprise et dut se contenter de ravager, sur la côte d’Adel, Zeyla, Berbera et Metè, qui furent évacuées à son approche.

A partir d’Acannæ, la côte tourne brusquement au sud. Le dernier comptoir d’aromates sur le continent barbaresque se rencontre au midi sous un promontoire escarpé. Le mouillage, exposé aux vents du nord, est peu sûr. Un signe certain de l’approche de quelque tempête, c’est le trouble qui se produit au fond de la mer et en change la couleur. Dès que ce signe se manifeste, les habitans du comptoir se réfugient tous sur le sommet du cap, qu’ils appellent le promontoire Tabæ. Les abords de ce promontoire, très peu distant du cap des Aromates, les marins de nos jours ne les connaissent que trop : plus d’un y a fait naufrage. Il suffit de nommer le cap