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1689 par l’incendie et la dévastation du Palatinat, durera dix ans. Les armes françaises ont encore de glorieuses journées : les victoires de Luxembourg, à Fleurus, à Steinkerque, à Nerwinde, celles de Catinat en Italie ; mais ces succès sont mêlés de revers et l’échec de la flotte à La Hogue consterne la France habituée à la victoire. Louis XIV vient encore, en personne, investir et prendre Mons en 1691 ; Namur en 1692 ; cependant, en 1693, il ne trouve pas devant la ville de Liège, couverte à temps par le roi Guillaume, le triomphe assuré qu’il est venu chercher, et rentrant à Versailles, il abandonne pour toujours le commandement des armées. Pendant trois ans, la lutte se poursuit en se ralentissant : l’ancien conquérant de la Hollande et de la Franche-Comté ne peut plus que se tenir sur la défensive ; et le traité de Ryswick, en 1697, l’oblige à restituer une partie de ses anciennes conquêtes, en lui laissant cependant Strasbourg,

Louis XIV ne songeait alors qu’à se rendre libre de suivre et de résoudre les questions qu’allait soulever la mort de Charles II. En acceptant le testament de ce prince, et en faisant résolument monter son petit-fils sur le trône d’Espagne, il provoque, à soixante-deux ans, la grande ligue de La Haye entre l’Angleterre, la Hollande, l’Autriche, l’Empire, le Portugal. Il a perdu Condé, Turenne, Luxembourg, et dans la guerre de la succession d’Espagne ce sont les noms des généraux ennemis, du prince Eugène, de Marlborough, qui désormais vont retentir. Si, dans les premières campagnes, les succès se balancent, la bataille de Hochstedt en 1704, les défaites de Ramillies et de Turin en 1706 nous font perdre les places que nous occupions en Allemagne, dans les Pays-Bas, en Italie : le Dauphiné est menacé. En 1708, le roi, faisant un suprême effort, peut encore entretenir cinq armées ; mais la déroute d’Audenarde sur l’Escaut est suivie d’une retraite plus désastreuse encore : Gand, Bruges, Lille, assiégés par les Impériaux, capitulent, et la frontière française est entamée : on dit qu’un parti de Hollandais put s’avancer sur la route de Versailles. Louis XIV en est réduit à demander la paix ; cependant quand on va jusqu’à exiger qu’il rende Strasbourg, qu’il renonce à l’Alsace, que lui-même chasse d’Espagne son petit-fils, sa fierté indignée se révolte, et ce n’est pas en vain que, dans un noble langage, il fait un dernier appel au patriotisme du pays. À Malplaquet, 90,000 hommes, commandés par Villars, se défendent avec succès contre Marlborough, à la tête de 120,000 hommes ; cette glorieuse défaite marque le terme de nos revers, et la grande victoire de Denain finit par rendre possibles les traités d’Utrecht, de Rastadt, et de Bade, qui, rétablissant la paix à des conditions inespérées, laissent à Louis XIV les premières acquisitions de son règne, l’Alsace avec Strasbourg, Sarrelouis et Landau : une partie