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pâte épaisse et noire, dont rien encore ne fait deviner la richesse, et dont les produits chimiques les plus brillans vont être tirés tour à tour.

De cette pâte on va d’abord séparer de l’eau saturée d’ammoniaque. L’opération est fort simple, mais doit être conduite avec précaution. Les chaudières sont lentement chauffées jusqu’à 80 ou 90 degrés au plus, et cette température est maintenue pendant un temps assez long, environ vingt ou trente heures. Alors le goudron monte à la surface, où il forme une couche épaisse ; et un robinet de vidange, placé à la partie inférieure de la chaudière, permet de faire écouler l’eau ammoniacale.

Après ce travail préparatoire, on procède à une opération que nous avons déjà décrite : la distillation fractionnée. Ou sépare ainsi les huiles légères, les huiles moyennes et les huiles lourdes. Les huiles légères s’évaporent à une température inférieure 140 degrés ; les huiles moyennes entre 140 et 200 degrés ; les huiles lourdes, de 200 à 360 degrés. Il ne s’agit donc que de chauffer lentement la chaudière et d’atteindre successivement ces diverses températures. Les vapeurs se condensent en circulant dans un serpentin refroidi. Dès que la chaleur dépasse 140 degrés, et dès qu’elle monte au-dessus de 200, un ouvrier dirige les vapeurs vers un autre récipient. L’alambic gigantesque qui est employé pour cette distillation peut avoir 20 ou même 30 mètres cubes de capacité. C’est une chaudière en tôle épaisse, horizontalement couchée sous une voûte en briques réfractaires qui la sépare du foyer. Elle communique avec les trois appareils condensateurs, et l’ouvrier chargé de conduire la distillation n’a qu’à ouvrir un robinet et à en fermer un autre pour faire passer les vapeurs, au moment voulu, à travers l’un ou l’autre serpentin.

Ainsi une première séparation a été opérée. Nous avons d’abord soutiré de l’eau, saturée d’ammoniaque ; nous avons ensuite séparé trois sortes d’huiles. Il nous reste un épais résidu qui a résisté à l’évaporation, le brai. Ce sont les huiles du goudron que nous devons étudier ici.

Les deux premières huiles sont encore une fois distillées, dans un alambic de 1,200 à 1,500 litres de capacité, chauffé par un serpentin à retour, où l’on fait circuler de la vapeur à haute pression. On commence par les huiles moyennes et l’on recueille tout ce qui passe entre 140 et 200 degrés. Tout ce qui a passé au-dessous de 140 degrés est mêlé aux huiles légères. Tout ce qui n’a point passé à 200 degrés est mêlé aux huiles lourdes. On épure ensuite de la même façon les huiles légères.

Celles-ci sont connues dans le commerce sous le nom d’huiles de naphte. Il serait trop long d’énumérer les dix-huit ou vingt corps