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vêtus. Ils s’habillent presque tous en blanc et, comme ils cultivent peu de coton et ne possèdent que des métiers à main très primitifs, on peut croire qu’ils s’empresseront d’acheter des étoffes à bon marché, d’un tissage solide et durable, anglaises probablement.

La valeur totale des exportations au Japon des marchandises coréennes pendant les cinq années, — 1877 à 1881, — a été de 5,104,859 yens. Les articles les plus importans sont : le riz, l’or, surtout en poudre, les peaux et les légumes. Quant à la statistique des navires japonais entrés dans les ports ouverts de la Corée, elle ne va que jusqu’en 1881. Le tonnage total des navires de toutes les classes, bateaux à vapeur, navires à voiles et jonques, a été de 60,459 tonnes. Les navires à vapeur appartiennent presque tous à la grande compagnie japonaise Mitsu-Bishi, qui a organisé un service régulier entre Kobé, Nagasaki et les ports coréens.

L’année 1883 verra donc cesser le privilège concédé aux Japonais depuis 1877. Le roi de Corée l’a annoncé en ces termes quelque peu embarrassés à ses sujets : « Nous avons passé des traités avec les États-Unis d’Amérique, l’Angleterre et l’Allemagne. Certes, voilà une innovation, et elle pourra peut-être causer quelque mécontentement à mon peuple, mais, partout aujourd’hui, les relations internationales sont d’un usage général. Ainsi, il ne peut résulter aucune difficulté de ce que notre pays adopte des associations de bonne foi et conformes au droit de ses peuples. »

En demandant sous peu au jeune roi des Coréens de nous accueillir au même titre que les autres puissances occidentales, le souvenir du sang français qui a été si largement versé dans ses états, doit, — quelque douleur que nous en ressentions, — s’effacer de notre mémoire. Il ne s’agit donc plus que de pénétrer dans un pays nouveau, pour y faire connaître les productions de notre sol, de nos industries, et tirer de la péninsule coréenne ce qui peut nous être utile. Par notre loyauté dans les transactions, la franchise de nos paroles, une grande réserve en présence d’anciennes coutumes, nous sommes certains de nous attirer les sympathies des Coréens. Si notre civilisation, nos croyances, sont supérieures aux leurs, ils les adopteront, tout naturellement sans qu’il soit utile d’inquiéter leurs consciences, sans qu’il soit besoin d’exposer d’ardentes natures à confesser leur foi religieuse dans les tortures et la mort.


Edmond Plauchut.