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LE MOUVEMENT FINANCIER DE LA QUINZAINE

Il y a quelques jours à peine, le lendemain de la liquidation de fin janvier, le 4 1/2 pour 100 était coté 107 francs, et les deux 3 pour 100, 77.60 et 78.50. Les prix des reports s’étaient remarquablement tendus la veille ; mais la spéculation à la hausse s’en inquiétait peu ; le parlement venait de voter le budget extraordinaire de 1884 et, par conséquent, le ministre des finances était autorisé à émettre l’emprunt de 350 millions dont on avait tant parlé. Pendant tout le mois de janvier, de puissantes interventions financières avaient travaillé à préparer favorablement la place en vue de cet emprunt, la liquidation consacrait la défaite des baissiers ; le ministre n’avait plus qu’à publier les conditions de l’opération attendue ; nul doute que le public financier ne fit à celle-ci un excellent accueil.

C’est le dimanche 3 février que parurent au Journal officiel le décret et l’arrêté portant à la connaissance de l’épargne à quelles conditions l’état invitait les capitalistes français, grands ou petits, à venir échanger aux guichets du Trésor leurs fonds disponibles contre des inscriptions de rente amortissable. Le désappointement fut général. Il semblait que le ministre eût pris en quelque sorte plaisir à gâter par des fautes invraisemblables une situation qui était véritablement bonne et d’où pouvait sortir un relèvement général du crédit par une impulsion vigoureuse donnée à la reprise des affaires.

La première et la plus grave de ces fautes est celle qui se rattache à la fixation du taux d’émission de la nouvelle rente.

On supposait en général que la rente nouvelle serait émise entre 76 et 76.25, jouissance janvier 1884,, c’est-à-dire avec assimilation immédiate à la rente déjà existante, et avec le droit au tirage du mois de mars prochain. Or le prospectus officiel apprenait au public qu’on ne lui donnerait le papier mis en souscription qu’à 76.60, sans aucun droit au coupon d’avril non plus qu’au tirage de mars, de sorte que pour avoir le taux exact d’émission, il fallait ajouter au prix déjà trop élevé de 76.60 le montant d’un coupon supprimé, c’est-à-dire 0 fr. 75 et quelques centimes encore pour la non-participation aux chances du tirage. En fait, le prix de la rente à créer ressortait à 77.50 environ,