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de la révolution que les états allaient être obligés de sanctionner.

Encouragés par les premières ouvertures qui avaient été faites la veille à l’assemblée, les députés de Rotterdam prirent des mesures détournées pour provoquer la délibération, qui ne pouvait plus être retardée. La motion fut faite par le bourgmestre Pesser, qui avait jusqu’alors été considéré comme l’un des principaux adversaires du parti orangiste. Il commença par déclarer qu’il avait, de la part de sa ville, une communication importante à faire pour le service du pays, mais que l’honneur et la loi ne lui permettaient pas de rendre publique, à moins qu’il n’obtînt l’autorisation expresse d’en donner connaissance. Les nobles n’étaient présens à l’assemblée qu’au nombre de trois, MM. de Duvenwoorde, d’Asperen et Maasdam ; ils affectèrent la surprise et réclamèrent des explications plus précises, mais en faisant entendre qu’il fallait se donner les uns aux autres pleine liberté de proposer toutes les résolutions réclamées par l’intérêt de l’état. Les députés de Dordrecht, ne voulant pas donner un démenti à l’inflexible résistance dont leur concitoyen, Corneille de Witt, venait de leur donner l’exemple, essaient vainement d’arrêter le courant ; ils déclarent qu’ils ne se croient pas autorisés à laisser parler d’une affaire sur laquelle une loi fondamentale interdit toute délibération ; leur voix reste isolée. Les députés de Delft font savoir qu’ils se croient libres d’opiner s’ils y sont autorisés par le conseil de leur ville. Les députés de Haarlem, moins timides, se prononcent en faveur de la demande de Rotterdam, en représentant la nécessité de donner une prompte satisfaction au peuple et le danger de la refuser. Plus hardis, les députés de Leyde renoncent aux ménagemens que les membres de l’assemblée semblaient encore vouloir garder et n’usent plus d’aucun détour. Le pensionnaire Burgersdyck représente en leur nom qu’il est mutile de dissimuler plus longtemps et constate que la proposition de Rotterdam a pour but l’abolition de l’édit perpétuel ; il demande qu’elle soit dès lors mise en délibération, mais en ajoutant qu’il ne peut se prononcer sans avoir reçu les instructions des régens de Leyde, dont il n’est que le délégué.

Cette franche déclaration fait cesser toute incertitude, et les députés, procédant à un second tour de scrutin, n’hésitent plus à opiner ouvertement sur l’abrogation de redit perpétuel. Les nobles se prononcent les premiers pour la dispense du serment. Le pensionnaire d’Haarlem, ne voulant pas se laisser devancer, demande qu’on se hâte de pourvoir à la nomination du prince d’Orange comme stathouder, afin d’éviter des retards qui ne peuvent être que préjudiciables. Les autres députés, plus circonspects pour la plupart, se tiennent sur la réserve ; mais ils se mettent d’accord pour se dispenser du serment et en relèvent également les