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ascensions téméraires et le peu de profit qu’on en a tiré. Quelques bolides qui deviennent lumineux par la résistance que l’air leur oppose ont permis de fixer de 50 à 100 kilomètres la limite appréciable de cet air, mais ce n’est qu’une approximation ; tout prouve qu’il s’étend bien au-delà en se dilatant toujours ; on ne peut pas même affirmer que l’atmosphère soit limitée. M. Schwedoff soutient qu’elle ne l’est pas ; M. Siemens se croit autorisé à dire que l’espace tout entier entre le soleil et la terre est rempli d’un gaz, à la vérité, très dilaté, mais indéfini, et que l’attraction seule le condense progressivement et l’accumule autour de la terre. Ce qui est sûr, et ce qu’il nous importe de savoir, c’est que cet air se raréfie de plus en plus dans les hauteurs.

Sa composition elle-même est variable : la quantité de vapeur d’eau qu’il renferme change perpétuellement ; elle diminue d’abord jusqu’à la hauteur occupée par les nuages ; mais il est certain que la proportion de cette vapeur comparée à celle de l’air sec va en augmentant dans les grandes altitudes et que peut-être les dernières couches ne sont plus formées que de vapeur d’eau. Ce n’est pas tout : l’atmosphère n’est pas uniquement composée de corps gazeux ; au milieu d’eux flottent et voltigent des myriades de particules dont la petitesse est extrême ; les unes sont solides, les autres liquides ; surtout il y a de l’eau sous la forme de cristaux glacés, ou de vésicules creuses, ou de sphères pleines. Ces particules se réunissent en nuages, bas ou élevés, offrant tous les degrés de transparence ou d’opacité, et leurs propriétés changent avec leur grosseur. Tyndall a montré que la condensation de certaines vapeurs constitue des nébulosités spéciales extrêmement divisées et de qualités très curieuses. Il y a, d’autre part, des brouillards secs. En 1783 et en 1831, on en vit qui couvraient une grande partie de l’Europe et qui durèrent plusieurs mois. Enfin il est certain que des poussières cosmiques contenant du fer météorique se déposent peu à peu sur le sol, sur la neige des contrées polaires où M. Nordenskiöld les a recueillies. Plus communément on rencontre des poussières plus grossières, que les vents soulèvent et qui viennent du sol. Leur masse est bien plus considérable qu’on ne le croit généralement : M. G. Tissandier a essayé d’en apprécier la masse par un procédé tout à fait sûr. Il faisait passer un courant d’air à travers un tube où il avait disposé des tampons de fulmicoton ; forcé de les traverser, l’air y déposait des poussières qu’on recueillait ensuite en dissolvant le fulmicoton dans l’éther. M. Tissandier trouva que, sur l’étendue du Champ de Mars, dans une masse d’air de 5 mètres de hauteur, il y a jusqu’à 15 kilogrammes de ces poussières, composées à la fois de matières organiques et minérales.