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une réduction du revenu territorial. Les causes en sont manifestes, d’abord dans la concurrence des terres nouvelles et fertiles d’Amérique, d’Asie, d’Australie, qui diminue les privilèges de fertilité pour les terres; puis dans la facilité et le bon marché croissans des transports, qui diminuent par une circulation meilleure les privilèges de situation. Ajoutons que, si l’on grevait la propriété territoriale, comme le demande Stuart Mill, on gênerait l’expansion de la propriété sous un mode sans y mettre obstacle sous un autre beaucoup plus fécond en abus, celui des valeurs mobilières; conséquemment, on n’assurerait pas mieux l’accès de la propriété à ceux qui en sont dépourvus. En France, la propriété foncière ne saurait être grevée au moment même où notre agriculture traverse une crise fâcheuse due à la concurrence écrasante des blés d’Amérique. Le péril est tel que nos agriculteurs réclament des droits protecteurs. Si on ne leur concède pas ces droits, au moins est-il juste de ne pas faire retomber sur eux les accusations socialistes contre la propriété. Cette invasion des blés et des viandes d’Amérique, que ne pouvaient prévoir ni Ricardo ni Stuart Mill, prouve que la rente de la terre n’augmente pas toujours et partout, qu’il y a là un phénomène variable et susceptible d’interruption.

Outre l’impôt impraticable sur la rente foncière, destiné à absorber la plus-value au profit de l’état, on a encore proposé le rachat du sol par l’état, qui en ferait ensuite aux particuliers des concessions temporaires moyennant un prix de fermage déterminé par la mise aux enchères. Ce serait une opération analogue au rachat des chemins de fer. Mais on a fort bien montré, selon nous, que l’opération « est faite pour mener un pays à la banqueroute par le plus court chemin. » L’état, pendant de très longues années, ne