Page:Revue des Deux Mondes - 1884 - tome 64.djvu/433

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LES MAITRES
DE
L'OPERA FRANCAIS

En ce temps où plus que jamais la musique allemande, comme une invasion nouvelle, s’est répandue sur l’Europe entière, on est assez mal venu à parler de la musique française. Il semble même qu’un effort de patriotisme soit nécessaire pour revenir sur cette cause, que l’on croit définitivement jugée. Depuis quelques années, en effet, nos idées se sont si profondément modifiées que l’on ne trouve pas sans peine des défenseurs de nos vieilles traditions musicales ; et, chose plus fâcheuse ! nos compositeurs, les meilleurs même de nos jours, ont aidé à cette destruction du passé. Encore une fois, les esprits se sont donc tournés vers un seul pays ou vers un seul homme, et, comme il y a cent ans, c’est toujours du Nord que nous vient la lumière : triste résultat, qui fait au moins mal préjuger de notre nature ou de nos forces. L’invasion cependant avance sains relâche, et nous la subissons, toujours plus docilement, nous la glorifions même, comme si nous n’avions plus auprès de nous des maîtres capables de nous donner de bonnes et solides leçons.

Mais, avant tout, qu’on ne nous accuse pas de contester un seul instant la valeur des musiciens de l’Allemagne. Notre unique regret