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Page:Revue des Deux Mondes - 1884 - tome 64.djvu/540

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ans pour une partie du contingent, et les sous-officiers ne manqueront pas.


III

L’organisation d’une armée est un sujet d’étude si considérable, si complexe, qu’il faudrait des volumes pour en parler convenablement. On se contentera donc d’indiquer ici quelques-uns des points les plus importans, en en laissant de côté beaucoup d’autres, dignes d’intérêt cependant, et tous les détails secondaires.

Deux choses ont frappé ceux qui ont été victimes des événemens de 1870 : l’insuffisance des préparatifs et les voyages inutiles faits en tous sens par les hommes qui allaient de tous côtés rejoindre leurs corps pour reprendre ensuite avec eux la direction même qu’ils venaient de parcourir. On a donc résolu de former les corps sur place et de les pourvoir de tout ce dont ils avaient besoin avant de les mettre en marche. Certes l’idée était bonne, mais elle a été singulièrement gâtée dans l’application par un parti-pris de symétrie à outrance, qu’on a confondu avec la simplicité, quoiqu’il en soit justement le contraire. La moindre réflexion aurait dû faire comprendre que le but de l’armée étant la défense du pays, on ne pouvait traiter Limoges ou Clermont de la même manière que Nice ou Nancy, menacées par les premières démonstrations de l’ennemi. Nos pères avaient voulu que les principales forces fussent massées en temps de paix le long de la frontière : la cavalerie tenait garnison dans les régions riches en fourrages ; les magasins étaient abrités dans les places fortes ; on parait ainsi aux premiers dangers, et les renforts affluaient ensuite de tous les points du territoire. La première partie de ce plan était excellente ; la seconde devait être modifiée, puisqu’on avait besoin de plus de monde et qu’on disposait d’ailleurs d’un réseau de communications bien préférable. On a tout bouleversé, réparti l’armée uniformément dans toutes les parties de la France en dégarnissant la frontière. Il est bien difficile de concevoir cependant qu’un procédé, si habile soit-il, puisse amener plus rapidement des troupes aux points de concentration que si elles s’y trouvaient déjà.

L’égalité de répartition a été poursuivie sans aucun égard pour la nature des lieux ni pour celle des produits du sol, sans considération pour la garde des forteresses à laquelle il a fallu pourvoir à l’aide d’expédiens. On ne s’est uniquement arrêté qu’à la manière de répartir les contingens. Fallait-il, à l’exemple de l’Allemagne, adopter le recrutement régional, avoir des régimens de Parisiens, de Flamands, de Bretons, de Languedociens, ou, mélanger entre eux des conscrits de toutes les provenances ? Le parti que l’on a choisi