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Page:Revue des Deux Mondes - 1884 - tome 65.djvu/181

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décisions judiciaires qui sont intervenues, il ne paraît pas que le conseil municipal obtienne gain de cause ; il devra probablement se résigner à négocier à l’amiable avec la compagnie. En attendant, le consommateur continue à payer le prix de 0 fr., 30 que la compagnie offrait, en 1882, d’abaisser moyennant des conditions que l’on pouvait discuter et qui ne semblaient pas excessives, et la population de Paris voit ajourner, au gré des lenteurs judiciaires et grâce à la conduite peu avisée de ses édiles, un dégrèvement qui est très désirable. Les emplois du gaz se sont en effet multipliés. Il ne s’agit plus seulement de l’éclairage public ou privé : le gaz s’introduit de plus en plus dans les usages domestiques, et, au moyen d’ingénieux appareils, il est converti en force motrice que l’industrie utilise dans les plus modestes ateliers. C’est une réforme démocratique au premier chef ; elle ne doit être poursuivie, et elle ne peut être obtenue que par des procédés honnêtes et par le respect des contrats.

Aux termes des traités conclus de 1855 à 1860, les principaux services d’utilité municipale doivent demeurer, pendant trente années encore, sous le régime de la concession privilégiée, sauf les cas de déchéance stipulés contre les compagnies qui ne seraient pas en mesure d’exécuter leurs engagemens. Ce régime est aujourd’hui l’objet de violentes critiques. Parmi ses adversaires, les uns prétendent soustraire les services publics à l’entreprise privée, exclure les compagnies et imposer à l’administration municipale le devoir d’exploiter directement, au profit exclusif de la communauté, les services urbains ; les autres, repoussant tout monopole, le monopole municipal autant que le monopole des compagnies concessionnaires, demandent que le principe de la liberté soit appliqué aux services du transport en commun, du gaz, des eaux comme à toutes les autres branches de commerce, et ils attendent de la concurrence, secondée par l’abondance actuelle des capitaux, un service plus profitable pour le public. Ce débat entre les deux doctrines contraires n’intéresse pas notre génération, qui est rivée aux contrats existans. Il suffit de constater, pour le moment, que le régime de la concession privilégiée, régime exceptionnel dont il ne faut user qu’avec une extrême réserve, est contemporain de l’extension et de la transformation de Paris, qu’il a contribué, pour une large part au succès de cette vaste entreprise et qu’il procure à la population des avantages incontestables. On peut ajouter que, dans la plupart des grandes villes, à l’étranger comme en France, le même système a été adopté. S’il a contre lui les principes autoritaires et les principes libéraux, il se recommande par l’utilité, par les résultats, obtenus. Il dépend des administrations