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doit craindre de trop demander à ceux qui possèdent et qui paient, sous prétexte qu’on tarira les sources mêmes du revenu ? — Mais à qui demander sinon à ceux qui ont ? répondra le nombre et, en définitive, quand le souverain aura parlé, comme il n’y a pas d’appel contre sa décision, il faudra bien obéir, dût l’avenir en souffrir davantage, Qu’est donc l’avenir en face du présent inéluctable et omnipotent ? Oui, l’instruction doit être répandue, mais on la veut laïque. Oui, les misères humaines doivent être secourues, et la bienfaisance se répandre sur tous, c’est une nécessité qui incombe aux départemens, à l’état ; la charité privée, sans être prescrite, n’a pas à intervenir dans l’œuvre commune en s’imposant avec ses sentimens religieux et des pratiques dont la majorité souveraine répudie le concours. Au fond, il ne s’agit pas de savoir si l’union de ces forces ne serait pas le meilleur moyen de parer au mal ; en ce moment elle n’est pas dans les vœux de la majorité politique, elle n’est donc pas dans les probabilités à venir ; et on ne doit pas la comprendre dans l’évaluation des efforts qu’il faut accumuler pour résoudre le problème dès à présent posé.


III

Ainsi donc, augmentation des dépenses non seulement possible, mais certaine, sur tous nos budgets, et en particulier sur celui qui nous occupe aujourd’hui, sur le budget départemental : voilà ce qui ressort des chiffres et des considérations qui précèdent. Or sur le budget départemental la lumière n’était pas facile à obtenir il y a encore deux ans ; depuis lors, le ministère de l’intérieur a publié un document nouveau qui permet d’y voir plus clair et de préciser à quels moyens on peut recourir afin d’obtenir les recettes aujourd’hui nécessaires pour faire face aux dépenses, puisque nous avons cru devoir faire passer dans notre examen celles-ci avant celles-là.

D’après un tableau publié pour la première fois pour l’exercice 1883 et ajouté à celui des ressources de toutes les communes de France et d’Algérie, le revenu départemental proprement dit se serait élevé à 118 millions de produits éventuels, c’est-à-dire de produits de toute sorte, autres que celui des centimes additionnels ; et en multipliant dans chaque département la valeur du centime départemental par le nombre de ces centimes, ce que ne fait pas lui-même le tableau dont il s’agit, mais ce dont il fournit le moyen, le produit des centimes dépasse 190 millions, soit, en tout, 309 millions de recettes en chiffres ronds. L’année précédente, M. Goblet, ministre de l’intérieur, présentant un projet de loi, qui ne fut pas adopté, sur la création de budgets cantonaux, disait que