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manqué de présenter leurs remèdes. Le rapporteur de l’Enquête badoise, qui a relevé avec soin les propositions de ses commissaires, en a enregistré quarante-deux, dont vingt-deux sont applicables par les cultivateurs eux-mêmes et vingt par le gouvernement. Les deux autres enquêtes n’ont pas présenté de résumé, et nous n’avons noté que les propositions saillantes ; elles sont au nombre d’une quinzaine, et c’est peut-être encore trop. Cependant, cette abondance de remèdes ne cous étonnera plus quand nous aurons présent à l’esprit que la plupart ne s’appliquent qu’à des maux locaux ; ceux-là nous pouvons les négliger entièrement. Parmi les propositions qui visent l’ensemble de l’agriculture, quelques-unes sont inspirées par la politique, ce sont celles qui veulent maintenir les biens dans la famille, en favorisant l’un des héritiers, qui veulent poser une barrière au morcellement, interdire les dettes foncières fit constituer un nouvel « ordre des paysans. » Les partisans de ces moyens se défendent d’être réactionnaires, mais sans succès ; l’agitation qu’ils ont soulevée dans le pays est conduite par des hommes dont quelques-uns brillent au premier rang parmi les hobereaux.

Ils se rencontrent cependant sur plusieurs points avec des hommes faisant profession d’opinions libérales, par exemple, dans la demande d’une meilleure organisation du crédit et dans l’encouragement de la réunion des parcelles. Le crédit, on voudrait l’émanciper des capitalistes, qui seraient remplacés par des sociétés de prêteurs, tant pour les dettes mobilières que pour les dettes immobilières[1] ; la réunion des parcelles ferait disparaître l’un des inconvéniens du morcellement. Cette opération, dont il n’existe en France qu’un ou deux exemples datant du commencement de ce siècle, est très fréquente en Allemagne, où elle est favorisée par la législation. Lorsque les champs d’un cultivateur, propriétaire peut-être de 10 hectares, sont divisés en 40 ou 50 parcelles dispersés sur le territoire d’une commune, et qu’il emploie une demi-heure et davantage pour aller de l’une à l’autre, il perd beaucoup du temps, et souvent aussi ses cultures sont gênées parce qu’elles se trouvent enclavées dans celle d’un voisin. Par la réunion des parcelles au moyen d’échanges, il se forme des biens d’un seul tenant ou composés de deux ou trois

  1. On semble oublier qu’on Prusse comme en Italie, les caisses d’épargne ne versent pas au trésor les dépôts qu’on leur confie ; elles les placent comme elles l’entendent. En 1881, les caisses d’épargne ont reçu en Prusse en dépôt la somme de 1819 millions de marks, dont elles ont placé 1754 millions de la manière suivante : 27.95 pour 100 en hypothèques urbaines, 27.98 pour 100 en hypothèques rurales, 24.72 pour 100 en valeurs au porteur, 9.75 pour 100 an billets à ordre cautionnés, 2.63 pour 100 en prêts sur gages, 6.97 pour 100 en prêts à des communes et institutions publiques.