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Parmi les écoles professionnelles, les unes confinent à l’usine ou à l’atelier et lui appartiennent; les autres sont organisées soit par les syndicats et les comités de patronage pour les différentes professions, soit par l’état, soit par les conseils municipaux ou par les chambres de commerce dans les grandes villes, et même dans certaines villes d’importance secondaire, qui tiennent à conserver leur réputation depuis longtemps acquise pour une industrie spéciale, comme Limoges pour la céramique, Besançon pour l’horlogerie, Aubusson pour la tapisserie, etc. Cette variété de combinaisons répond, comme nous l’avons dit, à la diversité des besoins et des intérêts; chacun de ces modes d’enseignement a ses avantages comme ses inconvéniens ou ses lacunes. Il n’est point nécessaire d’imaginer de systèmes nouveaux ; il suffirait d’améliorer et de compléter les modes actuels.

L’installation de l’école à proximité de l’usine ou de l’atelier se recommande à tous les titres. Le patron, qui en supporte la dépense et qui compte y recruter ses meilleurs ouvriers, est doublement intéressé à son succès. Quelques chefs d’industrie ont même essayé de joindre l’internat à l’école, afin d’obtenir l’assiduité aux cours et de préserver des tentations extérieures le moral des jeunes ouvriers. Ce serait la forme la plus élevée et la plus parfaite de l’apprentissage ; mais le problème ainsi étendu sera très difficile à résoudre. L’école professionnelle sans internat n’est elle-même praticable que dans une mesure assez restreinte. Il faut que l’établissement auquel elle se rattache soit considérable et que le patron possède de grandes ressources. Ces deux conditions sont nécessaires pour assurer l’avenir des élèves, qui doivent avoir la certitude de trouver, au sortir de l’école, l’atelier ouvert et une place avantageuse dans cet atelier. Par conséquent, s’il convient d’applaudir aux dispositions prises par plusieurs chefs d’industrie pour organiser des écoles professionnelles privées, on doit reconnaître que ce mode d’enseignement demeurera toujours à l’état d’exception.

L’instruction professionnelle des ouvriers d’art sera donc mieux servie ou, du moins, plus généralement répandue au moyen des écoles organisées par l’autorité publique ou par les groupes corporatifs. Mais les industriels entendus par la commission d’enquête sont loin de s’accorder sur le programme de l’enseignement. Les uns veulent que chaque industrie ait son école, les autres admettent que la même école forme des ouvriers et des artistes destinés à exercer différentes industries. Les premiers font observer que l’on ne peut composer un dessin sans connaître à fond la fabrication du tissu auquel il s’applique. Ils déclarent qu’un ouvrier sculpteur doit connaître parfaitement la fibre du bois ou le grain