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Page:Revue des Deux Mondes - 1885 - tome 67.djvu/720

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entreprise au cœur du Soudan pour la délivrance de Gordon, l’héroïque gardien de Khartoum. C’est là, pour le moment, un autre côté et assurément la partie la plus saisissante, la plus dramatique de l’affaire égyptienne.

Pendant qu’on négocie ou qu’on va négocier en effet sur la situation de l’Egypte, les soldats anglais du corps expéditionnaire de lord Wolseley marchent à travers le désert au but qui leur a été assigné, à la délivrance de Khartoum et de cet étrange héros qui depuis un an est là en sentinelle perdue de son pays, attendant d’être relevé ! Lord Wolseley, en homme expérimenté qui s’est rendu compte de toutes les difficultés de l’entreprise dont il s’était chargé, a su se défendre de toute impatience et ne rien précipiter. Avant d’engager ses soldats dans les sables brûlans où la rencontre de l’ennemi était le moindre danger, où ils étaient exposés à souffrir des marches épuisantes et de la soif, il a voulu évidemment faire tous ses préparatifs, prendre toutes ses mesures, et ce n’est qu’il y a quelques semaines qu’il s’est décidé à mettre ses troupes en mouvement. Tandis qu’une colonne sous les ordres du général Earle était chargée de remonter le Nil, le général Herbert Stewart, avec quinze cents hommes, était dirigé à travers le désert sur Métammeh, dont la possession devait ouvrir le chemin de Khanoum. Le commandant en chef s’était porté sur Koni, prêt à soutenir ses lieutenans. Sir Herbert Stewart, après les marches les plus pénibles, a le premier rencontré l’ennemi le 16 janvier au soir ; aux abords des puits d’Ahou-Klea, où il était impatient d’arriver, il a trouvé devant lui un corps de l’armée du mahdi, fort de dix mille hommes, et accouru pour lui disputer le passage. Dès le 17 au matin, le combat s’est engagé, il a duré depuis les premières lueurs du jour jusqu’à cinq heures du soir. La lutte a été certainement des plus chaudes, puisque les Anglais ont eu encore une fois leur carré rompu par les soldats du mahdi, et que sur leur faible contingent, ils ont perdu près de deux cents hommes, dont dix-huit officiers tués ou blessés. Un des chefs les plus brillans de l’armée anglaise, connu par ses voyages aventureux et par son audace, le colonel Burnaby, a perdu la vie ; lord Saint-Vincent a été blessé. Les Anglais ont fini par rester maires du champ de bataille et des puits d’Abou-Klea, après avoir infligé à l’ennemi une perte de huit cents hommes. Ce n’était encore que le commencement. La petite colonne anglaise, remise en marche dès le lendemain matin, a eu sans cesse à combattre, jusqu’à une dernière affaire où sir Herbert Stewart a été lui-même assez grièvement blessa ; mais on touchait déjà au Nil, on approchait de Métammeh, et ce qui peut donner une importance décisive à cette série de combats livrés par les soldats de Stewart, c’est qu’en arrivant au Nil, on a trouvé des vapeurs envoyés de Khartoum