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Cette torpille servira à faire sauter une estacade, à briser un filet protecteur, voire même, si l’occasion s’en présente, à couler un navire. Avec ses hotchkiss, il criblera de balles les torpilleurs ennemis ; avec son éperon, il les choquera et les fera sombrer. Ce sera également, ainsi que nous l’avons exposé, le meilleur des béliers. Il remplacera le navire à éperon auquel d’excellens esprits pouvaient songer autrefois, mais qui serait aujourd’hui très inférieur à un torpilleur armé d’une torpille portée. Pour un armement aussi réduit et léger, il est très probable qu’on n’aura pas besoin d’un torpilleur de 41 mètres, qu’un torpilleur de 36 mètres de long environ et de 50 tonneaux suffira. Ce torpilleur devra pouvoir fournir, comme le torpilleur d’attaque, de 1,400 à 1,800 milles à 10 nœuds avec son approvisionnement de charbon ; il serait même bon que sa vitesse maximum fût, si possible, supérieure à celle du torpilleur d’attaque, dût son approvisionnement de charbon s’épuiser en moins de six jours. Ayant à poursuivre les torpilleurs ennemis, il n’ira jamais trop vite pour cela.

Voilà donc deux bateaux de construction à peu près identique, mais d’un armement différent, destinés l’un à l’attaque par la torpille, l’autre à la défense contre les torpilleurs. Ces bateaux marcheront toujours ensemble ; à chaque numéro de torpilleur d’attaque correspondra un même numéro de torpilleur de défense. Ils seront « amatelotés » deux par deux, et ne se quitteront jamais, l’un protégeant l’autre. Chacun de ces couples formera une unité de combat torpille. Quant à l’unité de combat canon, ce sera, nous le répétons, la canonnière de 14cm, que nous avons assez longuement décrite pour n’avoir pas besoin d’y revenir. Mais ces bateaux, torpilleurs et canonnières, dans lesquels on aura tout sacrifié à la vitesse, devront s’approvisionner au bout de sept ou huit jours de mer. Il leur faut des magasins où ils trouveront du charbon, des vivres, des hommes de rechange. Dans notre bassin de la Méditerranée, entre la France et l’Algérie, rien ne sera plus aisé ; les ports ne manqueront point. Dans un océan lointain, ils peuvent faire défaut, il est indispensable d’y suppléer. C’est une nécessité qui s’impose à toute marine légère. Bien que préconisant un navire d’un tonnage déjà considérable, M. Gougeard réclame, pour lui venir en aide, une flotte de transports. Nos petits bateaux seront soumis à la même loi. Dans leurs longues croisières, ils devront être escortés, eux aussi, par des transports. Nous choisirions pour ces derniers le type des paquebots des grandes compagnies anglaises et françaises, qui atteignent déjà des vitesses considérables, mais en portant d’emblée la leur à 16 ou 17 nœuds au moins. On les construira avec un grand nombre de