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premières séances de la commission, en 1874, nous vîmes de nos yeux les lacérations indignes dont les plus précieux registres avaient été l’objet. On sait combien de pièces ayant appartenu aux archivés se rencontraient dans les ventes publiques, et bien souvent sans que le ministère des affaires étrangères les pût revendiquer en justice, faute d’estampilles suffisantes. Voilà ce qu’avait produit, — malgré les soins d’Une administration digne de tous éloges, mais impuissante à réparer le passé, ou peut-être à empêcher encore certaines intrusions exceptionnelles, — cette belle garantie du secret, commode laisser-passer pour quelques privilégiés à l’abri du contrôle. La lumière publique est la seule garantie efficace contre de pareils abus, et le meilleur recours des administrateurs qui ne veulent connaître que leur devoir.

Les heureux résultats de l’esprit libéral dont la commission a été l’organe n’ont pas été seulement ses propres travaux et les diverses publications fuites sous les auspices du ministre des affaires étrangères. Le public, pour qui l’on s’efforçait, a répondu avec empressement à un généreux appel. En 1884, cent onze personnes sont venues consulter, dans la salle d’étude ouverte chaque jour près les Archives, deux mille neuf cent soixante-douze volumes. Une autre statistique, plus probante encore, serait celle qui énumérerait les bons ouvrages auxquels, dans ces dernières années, les nouvelles mesures ont donné naissance. La liste en serait longue : on la trouvera complète dans les très intéressans rapports que la direction des Archives présente chaque année au ministre, et qui sont insérés au Journal officiel. — N’y a-t-il pas lieu de penser que les sages mesures prises depuis onze ans par le ministère des affaires étrangères ont déjà porté quelques fruits ? Elles ont donné une excitation nouvelle aux travaux historiques, suscité une plus riche étude de nos annales nationales, et peut-être même contribué à fortifier le sens critique par cette naturelle séduction qu’offre pour une meilleure enquête l’abondance des informations pénétrantes ?


A. GEFFROY.