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bien par quelles phases l’esprit public a passé sur ce sujet. De 1819 à 1864, treize compagnies fondées avant cette dernière date se partageaient les faveurs du public, et la prospérité des plus anciennement fondées était bien grande : c’étaient la Générale, la Nationale, le Phénix, l’Union, le Soleil, la Providence, l’Urbaine, la France, l’Aigle, la Paternelle, la Confiance et le Monde. Les dernières, de date toute récente, ne figurent, dans cette première division des vingt compagnies dont la statistique a été donnée par le Moniteur des Assurances et dont nous avons parlé plus haut, que moyennant certaines réserves et comme très inférieures aux premières. Quant au second groupe formé de sept compagnies, c’est à un mouvement de spéculation pure et pour aider à des émissions d’actions qui donnaient lieu à de fortes primes non justifiées qu’il devait le jour. Pendant une assez longue période, les opérations d’assurances se développèrent avec une progression plus ou moins rapide selon que la spéculation semblait plus ou moins fiévreuse : dans un autre ordre d’entreprises, nous avons vu les mêmes péripéties et nous avons gardé le souvenir de toutes les affaires industrielles de banque, de chemins de fer, etc., qui ont été le théâtre des mêmes mouvemens; mais, pour toutes ces affaires, il a suffi d’un ralentissement dans la hausse pour produire un véritable krach, le mot est consacré, et renverser l’échafaudage à peine élevé. Quelques fusions s’opérèrent donc entre plusieurs sociétés d’assurances atteintes ; des mesures de préservation contre la concurrence et les commissions exagérées, surtout contre le trop bon marché des primes, furent prises ainsi que dans les sociétés d’assurances sur la vie, et dès 1881, un peu d’ordre commença à se rétablir.

De 1869 à 1883, les compagnies précitées ont payé à leurs sinistrés 630 millions contre des primes encaissées qui ont varié. La proportion des sinistres aux primes a été de 42 pour 100 au minimum en 1872 et au maximum de 71 pour 100 en 1881. Au 1er janvier 1884, les risques en cours des 13 sociétés formant le premier groupe des 20 compagnies dont il s’agit s’élevaient à 94 milliards, et les primes encaissées dans l’année 1883 à 74 millions contre 42 millions de sinistres ; pour les 7 compagnies du deuxième groupe, on a relevé 12 milliards de risques en cours. La proportion des sinistres par rapport aux primes a été de 56 pour 100 dans le premier groupe et de 70 dans le second. Ces chiffres n’ont pas besoin de commentaires. Quant à la situation financière des deux groupes, les résultats sont aussi des plus instructifs. Le capital social du premier groupe n’est que de 102 millions, tandis que celui du second s’élève à 105, plus cher par conséquent à rémunérer ; les réserves du premier groupe s’élèvent à 100 millions et le second n’en a guère que trois: le portefeuille du premier dépasse 448 millions contre