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Page:Revue des Deux Mondes - 1885 - tome 69.djvu/129

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UNE
COMÉDIENNE AU XVIIe SIÈCLE

MADELEINE BÉJART


Bien des noms sont mêlés à l’histoire de Molière, mais il en est deux surtout qui ont le privilège de nous attirer, ceux de Madeleine et d’Armande Béjart, deux sœurs, dont il aima l’une, dit-on, et épousa l’autre. Cette préférence s’explique par des causes assez diverses. D’abord le goût du scandale, Madeleine et Armande ayant été comédiennes, et d’humeur fort légère, à ce que l’on croit. Il faut y voir aussi la malignité trop naturelle qui nous porte à chercher dans la vie des grands hommes les faiblesses et les ridicules ; en les rendant semblables aux autres hommes, ne diminuent-ils pas la distance qui nous sépare d’eux ? On peut néanmoins, pour revenir sur ce sujet, invoquer des motifs plus avouables. D’abord, il est impossible que Madeleine et Armande Béjart n’aient pas exercé une certaine influence sur ce qu’il y a de plus intéressant dans Molière, à savoir ses œuvres ; la nature des choses le veut ainsi ; et, pour Molière en particulier, ses contemporains sont les premiers à le reconnaître. L’auteur de l’importante préface mise, en 1682, en tête de la première édition complète de son théâtre, dit expressément, à propos des « applications admirables » qu’il faisait dans ses comédies « des manières et des mœurs de tout le monde » : « Il s’y est joué le premier en plusieurs endroits sur des affaires de sa famille