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Au nord de Sarakhs, jusqu’à Merv, le pays est couvert de ruines qui prouvent que cette contrée fut jadis fertile et habitée; on attribue son abandon présent aux incursions des Merviens. De Sarakhs, deux routes principales mènent à Koussan au nord de Hérat, l’une sur la rive droite, l’autre sur la rive gauche du Hériroud; celle de la rive gauche, suivie par le détachement du général Lumsden, est carrossable jusqu’à Poul-i-Khatoun, mais elle est dominée par la rive droite, considérablement plus élevée. Suivant les correspondances anglaises, la vallée entre Sarakhs et Koussan, à l’exception du fortin persan de Naurus-Abad, n’offre aucun vestige d’habitation humaine; tout a été saccagé par les Turcomans. Au-dessus de Poul-i-Khatoun, la route sur la rive gauche cesse d’être carrossable, tandis que le chemin découvert par Lessar sur la rive droite traverse une contrée ouverte. Le plateau à l’est de la rivière n’est accessible sur une grande distance qu’aux passages de Germab et de Zoul-Fagar, ravins tortueux s’ouvrant sur le Hériroud, suivis jadis par les Turcomans de Merv pour ravager le Khorassan ; le premier de ces passages se trouve à 8 kilomètres, le second à 53 kilomètres en amont de Poul-i-Khatoun. Le territoire, peu connu jusqu’à présent, compris entre le Hériroud et le Mourgab, vu depuis les hauteurs du Paropamise, présenterait, au dire de M. Lessar et des Anglais, l’aspect d’une mer houleuse solidifiée.

Au nord de Hérat, deux ramifications se détachent du Paropamise, se dirigeant, l’une au nord-ouest, l’autre à l’ouest; cette dernière n’est qu’une suite de collines couvertes de chardons et d’assa-fœtida. Le Paropamise n’est donc pas une chaîne de hautes montagnes, mais une simple ramification du Kouh-i-Baba, qui s’abaisse en terrasses jusqu’au désert turcoman. Le versant septentrional du Paropamise donne naissance au Mourgab et à ses nombreux affluens, dont le Kouchk est le plus considérable; le pays arrosé par ces rivières porte le nom de Badghis (Venteux). Le fond des vallées est cultivé partout où il y a de l’eau; les montagnes, au contraire, sont entièrement déboisées, mais riches en gibier. Les villages ruinés, ainsi que les restes d’aqueducs, attestent que cette contrée fut autrefois très peuplée.

Habité par des Tatares, le Badghis fut ravagé par Chah-Abbas ; Nadir-Chah y transplanta les Djemchidis et les Char-Aïmaks, qui, dans notre siècle, eurent beaucoup à souffrir des alamanes merviennes. Le Kouchk coule entre deux chaînes de collines déboisées, parsemées de villages et de huttes en terre glaise. Cette vallée est habitée par environ quatre mille familles de Djemchidis, peuple paisible, élevant une excellente race de chevaux; ils sont nomades, vivent en été sous la tente et habitent en hiver leurs huttes de terre glaise, autour desquelles ils cultivent quelques champs. Le Mourgab