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permanente, dans les eaux de ces îles, pendant toute la saison du recrutement des travailleurs, c’est-à-dire de mai à septembre, « à l’effet de protéger les intérêts du commerce allemand et de repousser par la force tout acte de violence contre la vie et la propriété des Allemands. » Il s’ensuivit une correspondance aigre-douce entre les deux gouvernemens, jusqu’à ce que la maison Hernsheim eut reçu une indemnité. Le 27 juin 1884, aussitôt après l’exposé que le chancelier avait fait de sa politique coloniale, une nouvelle pétition lui fut adressée par MM. Hansemann et Bleichröder, au nom de la Cie de la Mer du Sud, à l’effet d’obtenir son assistance pour les projets de la Compagnie qui avaient surtout en vue la Nouvelle-Bretagne et la côte nord-est de la Nouvelle-Guinée, jusqu’au 141e degré, à l’exclusion expresse de la côte méridionale située sur le détroit de Torres. En conséquence de cette pétition, le comte Hatzfeldt invita, le 2 août 1884, le comte Munster à essayer d’arriver à un accord avec lord Granville au sujet des sphères respectives des intérêts allemands et anglais dans la mer du Sud. Le comte Hatzfeldt observait que le gouvernement anglais jouait dans cette question le même jeu que dans toutes les autres, qu’il traînait tout en longueur afin de pouvoir, avec le concours de ses colonies, accumuler les faits accomplis. Il ne pouvait être indifférent à l’Allemagne que le champ possible et déjà entrevu de son expansion commerciale et coloniale pût être soudainement déclaré faire partie du « domaine naturel » de l’Australie. C’était une allusion directe à la déclaration faite par la convention de Sydney, l’année précédente. Lord Granville s’émut des reproches du comte Hatzfeldt, et dès le 9 août 1884, il répondit en affirmant le sincère bon vouloir de l’Angleterre à l’égard de l’Allemagne et de toutes ses aspirations coloniales ; il reconnaissait que l’influence allemande était prédominante dans quelques-unes des îles de la mer du Sud, et il déclarait que « l’extension de la souveraineté britannique dans la Nouvelle-Guinée s’appliquerait uniquement à cette partie de l’île, la côte sud, qui a un intérêt spécial pour les colonies australiennes, mais sans préjuger aucune question territoriale au-delà de ces limites. » On a vu plus haut que, quelques jours plus tard, M. Gladstone fut beaucoup moins réservé dans la chambre des communes. Les ministres anglais ne se doutaient pas que leurs paroles, comme leurs actes, étaient guettées par M. de Bismarck. Dès le 19 août, un télégramme était adressé au consul allemand à Sydney, le chargeant d’avertir le commissaire impérial à la Nouvelle-Bretagne, que le gouvernement avait l’intention d’arborer le drapeau allemand sur l’archipel de la Nouvelle-Bretagne, et sur la côte nord de la Nouvelle-Guinée, en dehors de la sphère des intérêts anglais et hollandais, partout où des