Page:Revue des Deux Mondes - 1885 - tome 70.djvu/287

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’agriculture ; mais, par-delà ces paysages et ces tableaux, il montre du doigt à l’horizon les villages fortifiés que les descendans de ces pâtres sauvages ont bâtis par centaines sur les monts du Samnium et de la Sabine, au-dessus des plaines déjà fécondées par la charrue, et, tout au fond de la scène, il laisse apercevoir l’indestructible rocher du Capitole et les sept collines couronnées de leurs superbes édifices.

Sic rerum facta est pulcherrima Roma,
Septemque una sibi muro circumdedit arces.

Tel est le premier volume, le premier chapitre, si l’on veut, du grand ouvrage que M. Helbig nous promet sous le titre modeste de Contributions à l’histoire de la civilisation et de l’art dans l’ancienne Italie. À ce peuple primitif, dans certaines parties de la péninsule, étaient venus se substituer les Étrusques, qui y ont fondé tant d’opulentes et fameuses cités ; il semblait que l’historien n’eût plus qu’à se transporter dans cette Étrurie qu’il connaît si bien et à la suivre dans son développement jusqu’à l’heure où la conquête romaine lui enlève son originalité ; mais l’Étrurie ne s’explique pas par elle-même ; elle n’est arrivée à ce grand déploiement de puissance et de luxe que grâce aux modèles qui lui ont été fournis par des civilisations antérieures. Ses maîtres ont été les Phéniciens, d’une part, et, de l’autre, les Grecs. Pour comprendre l’Etrurie, il importe donc de savoir ce que ces deux peuples ont pu lui vendre quand ils se sont mis à placer sur ses marchés les produits de leur industrie.

Pour ce qui est de la Phénicie, M. Helbig avait déjà résolu la question. À propos de découvertes faites à Préneste, en 1875, il avait dressé le bilan de l’importation tyrienne et carthaginoise ; il avait indiqué à quels signes on reconnaît les objets qui sont sortis des ateliers ou des entrepôts de ces habiles ouvriers, de ces hardis marchands ; il avait montré que ces denrées se rencontrent dans les sépultures de la Sicile, de la Sardaigne, de la Campanie, du Latium et de l’Etrurie, phénomène qui s’explique par plusieurs siècles d’un commerce très actif. Le mémoire auquel nous faisons allusion ne date pas de dix ans[1]. Très neuves alors, les idées qu’il expose sont devenues aujourd’hui presque banales, tant elles se sont imposées par l’abondance et la solidité des preuves. Il restait à déterminer ce que l’Étrurie avait pris aux Grecs, quand, vers la fin du VIIIe siècle, après la fondation de

  1. Cenni sopra l’arte fenicia, Jettera di W. Helbig al sign. senatore G. Spano (dans les Annales de l’Institut de correspondance archéologique, 1876, p. 197-257).