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Page:Revue des Deux Mondes - 1885 - tome 70.djvu/781

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Devant ce fier langage, l’électeur ne jugea pas utile de continuer la discussion ; mais, pour donner une conclusion pratique à ces premiers pourparlers, il réclama le paiement des subsides arriérés dus à son père en vertu du traité de 1671. Cette réclamation éveilla les soupçons du roi, qui fit répondre par Villars que cette question serait examinée lorsqu’on discuterait les clauses du traité qu’il proposait à l’électeur de signer avec lui.

Fixé désormais sur l’étendue des avantages qu’il pouvait espérer de la France, Max-Emmanuel se retourna du côté de l’Autriche pour négocier avec elle les conditions de la prochaine campagne de Hongrie. Il envoya successivement à Vienne Mayr et Leydel, chargés de réclamer le paiement de 400,000 florins de subsides arriérés, d’obtenir, pour l’année courante, une somme non moins forte et un commandement en chef, enfin, de régler à son avantage les questions relatives aux quartiers et aux subsistances de ses troupes. Leydel, qui avait été mis au courant des propositions françaises et qui, selon toute apparence, avait inspiré la réponse de l’électeur au roi, ne manqua pas de se servir de ces offres pour peser sur la cour de Vienne ; il obtint facilement ce qu’il demandait et revint le 13 mai 1688 à Munich avec un traité qui assurait à l’électeur un subside de 350,000 florins et un commandement séparé ; mais entre temps, des intrigues s’étaient nouées, qui avaient encore compliqué la situation et ajouté aux indécisions de l’électeur. Mlle de Welen, restée à Vienne après le passage de Max-Emmanuel, s’y trouvait dans une situation compromettante pour son honneur et dont il fallait la tirer au plus vite. L’impératrice était dans une grande fureur : Kaunitz, au contraire, se félicitait d’un incident dont il espérait se servir pour attirer l’électeur à Vienne. Max-Emmanuel, accueillant avec émotion des espérances de paternité que les voies légitimes lui avaient jusqu’alors refusées, voulait faire venir la demoiselle à Munich et lui avait secrètement fait préparer un appartement au palais. A Vienne, on voulait la marier avec un Autrichien qui couvrirait sa faute et sauverait les apparences. La lutte s’était établie sur ce terrain. Elle avait été traversée par la légèreté de l’électeur, qui, subitement, s’était épris d’une demoiselle de sa cour, Mlle de Sinzendorf. Villars, croyant trouver en elle une auxiliaire, était entré dans son intimité : il s’était servi de son influence pour empêcher le voyage de l’électeur à Vienne ; mais, du même coup, il avait empêché celui de Venise, dont il espérait une heureuse diversion et des économies. Les fêtes dont Mlle de Sinzendorf était l’occasion étaient ruineuses : ce n’étaient que bals, comédies, déplacemens fastueux à Landshut ou à Schleissheim, courses et chasses en traîneaux, folles prodigalités qui épuisaient les ressources destinées à la guerre et détournaient l’attention du cas pressant de Mlle de