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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.



30 novembre.

Les affaires du monde n’ont décidément rien de brillant ; elles ne sont pas dans une de ces phases favorables ou tout est simple et clair, où les gouvernemens savent ce qu’ils veulent et se sentent maîtres de leur politique, où les nations attendent le lendemain avec confiance, sans craindre les surprises de l’inconnu. Tout au contraire est incertain et obscur, morose connue les jours d’hiver qui passent.

De quelque côté qu’on regarde, de l’occident à l’orient, du midi au nord, les incidens se succèdent et se multiplient comme des feux errans. Il y a des difficultés de vie intérieure, il y aussi des conflits ou des commencemens de conflits extérieurs qui, sans mettre précisément en péril la paix générale, entretiennent l’incertitude et dévoilent l’instabilité des choses. On sent qu’il y a partout une défiance vague de l’avenir, des malaises et des doutes, des malaises politiques et économiques aussi bien que des malaises de diplomatie. L’Europe, la vieille Europe, a beau se chercher elle-même, elle a de la peine à se ressaisir, à retrouver son équilibre et sa direction dans l’état où les événemens conduits par la force l’ont laissée. Elle vit au jour le jour, sur une sorte de foi publique, provisoirement protégée tout au plus par l’artifice puissant d’alliances laborieusement maintenues entre des empires qui ne sont pas toujours sûrs de s’entendre. Les peuples, dans leurs affaires intérieures, ont tout autant de peine à trouver leur voie, à se créer un système de conduite et une politique. Ils ont leurs difficultés et leurs embarras, leurs luttes de partis, leurs agitations, leurs crises d’institutions ou de parlemens, d’industrie et de finances. Ces crises, elles peuvent être plus ou moins vives, plus ou moins apparentes selon les tempéramens, les traditions et les mœurs des peuples qui ont à les subir, selon les cadres et le milieu où elles se