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qualifiées de cendres, De là aussi des transports lointains, dont il serait facile de citer maints exemples. Dans la nuit du 29 au 30 mai 1875, les habitans de la Suède et de la Norvège furent surpris par la chute d’une poussière grise, consistant en pierres ponces pulvérisées qui avaient été rejetées en très grandes quantités par les volcans de l’Islande. On n’a pas oublié que les produits de la catastrophe du détroit de la Sonde, des 27 et 28 août 1883, ont été mis en circulation sur une grande partie du globe.

Rappelons en passant que les poussières de l’air ne sont pas seulement, minérales ; souvent des corps organisés, animaux et végétaux, tels que des carapaces d’infusoires, des grains de pollen, des sporules, en forment une partie notable, si ce n’est la totalité. Lorsque l’eau atmosphérique rencontre sur son passage des poussières d’une espèce ou d’une autre, elle se les incorpore et produit des pluies boueuses qui ne sont pas rares. Il en est de teinte rouge qui ont autrefois été désignées sous le nom de pluies de sang, comme en décrit le livre des prodiges de Leucosthène.

Mais il est des poussières qui, incontestablement, nous arrivent de régions tout à fait étrangères à notre globe. A ce point de vue, les météorites charbonneuses d’Orgueil nous fournissent un premier document intéressant. Elles sont si friables qu’elles se réduisent en poudre sous la simple pression des doigts et qu’elles se seraient probablement pulvérisées dans leur trajet, si la croûte formée par la chaleur développée à leur entrée dans l’air ne les avait entourées et protégées. De plus, dès que les aérolithes de cette espèce sont mouillés par une faible quantité d’eau, ils se désagrègent complètement et se réduisent en particules extrêmement fines, par suite de la dissolution des sels alcalins qui en formaient comme le ciment. D’après cette propriété, si, le 14 mai 1864, le ciel n’avait pas été tout à fait serein, mais pluvieux, ou si une couche de nuages s’était rencontrée sur le passage des météorites d’Orgueil, celles-ci auraient disparu dans leur trajet, et, au lieu de les recueillir ; on n’aurait pu observer à la surface du sol qu’une boue visqueuse et noire.

C’est habituellement dans des circonstances tout autres, et sans l’intervention de l’eau, que l’on saisit l’arrivée de poussières extraterrestres. Dans leur parcours, les bolides à météorites sont suivis d’une traînée d’abord brillante, puis obscure, comme colle qui parait après la combustion d’une pièce d’artifice, elle prend et conserve, pendant un temps plus ou moins long, la disposition de la trajectoire en se substituant au sillon lumineux. Cette sorte de queue est due sans doute à des parcelles détachées du bolide, qui restent en suspension dans l’atmosphère et sont peu à peu